Le "tribunal" européen des réseaux sociaux met en cause Youtube pour son manque de coopération

Le Centre d'appels Europe, nouvel organe chargé de trancher les litiges des utilisateurs des réseaux sociaux dans l'Union européenne, a critiqué mercredi 30 septembre, le manque de coopération de certaines plateformes, en particulier Youtube, filiale de Google.
Le Centre d'appels Europe a été créé l'an dernier en réponse aux exigences du règlement européen sur les services numériques (DSA).
Un organisme extrajudiciaire à la portée des européens
Ce texte oblige les plateformes à proposer à leurs utilisateurs un organe extrajudiciaire pour trancher leurs contentieux, en commençant par ceux portant sur la suppression de contenus ou la fermeture de comptes, alors qu'auparavant, ils devaient saisir la justice via des procédures souvent longues et coûteuses.
Mais cette nouvelle "cour d'appel" des réseaux sociaux déplore un manque de coopération de la part de certaines plateformes.
Ainsi, l'organisme indépendant constate que la plupart des Européens ne connaissent pas son existence, probablement parce que les réseaux ne sont pas tous pressés d'encourager les consommateurs à faire appel de leurs décisions.
Le Centre les appelle donc à communiquer largement auprès des utilisateurs, pour remédier à ce manque de visibilité.
Et surtout, toutes les plateformes ne jouent pas le jeu: pour trancher les contentieux, le Centre a besoin d'analyser les contenus ou comptes supprimés, et il arrive que les entreprises aient du mal à les récupérer, voire traînent des pieds pour les transmettre.
Aucune donnée fournie par Youtube
C'est le cas en particulier de Youtube, qui jusqu'ici n'a fourni aucun contenu au Centre. Résultat, sur 343 saisines recevables concernant la filiale de Google reçues depuis moins d'un an, l'organe n'a pu en régler que 29, précise-t-il dans un rapport publié mercredi.
Cela se produit aussi, mais bien moins souvent, avec Facebook et Instagram (filiales de Meta), ainsi que Tiktok.
Dans ces cas-là, l'organe donne généralement raison "par défaut" aux internautes concernés, faute d'avoir pu examiner les contenus problématiques. Une façon de pousser les plateformes à coopérer.
Le Centre, encore en plein décollage (il a reçu jusqu'ici près de 10.000 saisines, dont environ 3.300 ont été jugées recevables, et 1.500 ont été traitées), veut étendre son activité à d'autres formes de litiges: d'ici à la fin de l'année, ceux liés aux arnaques et aux publicités, et, l'an prochain, les affaires d'usurpation d'identité.
L'organe veut aussi continuer d'ajouter de nouveaux réseaux à son périmètre, sans préciser lesquels. Au départ cantonné à Facebook, Tiktok, et Youtube, il s'est étendu à Instagram, Threads et dernièrement Pinterest.
Youtube "conteste" tout manquement
Auprès de Tech&Co, Youtube dément tout manquement: "Le [Centre d'appel Europe] n'a pas mis en place les garanties de confidentialité nécessaires pour que nous puissions partager les données d'utilisateur dont ils ont besoin pour régler les litiges concernant les décisions de modération de contenu."
"Comme nous l'avons indiqué à ACE il y a plusieurs mois, nous ne fournirons pas ces données sans un accord de partage de données qui respecte la vie privée des utilisateurs et soit conforme au RGPD. Étant donné qu'ACE n'a pas examiné l'intégralité du contenu YouTube signalé, nous contestons fermement les conclusions du rapport," précise un porte-parole de l'entreprise.