Logement: ces maires qui ne veulent pas délivrer de permis de construire

Alors que la Fondation Abbé Pierre vient de publier son rapport sur le mal-logement en France en alertant sur l'aggravation de la crise du logement, le manque de construction contribue largement à ce déséquilibre.
22 permis refusés à Villemomble
La responsabilité des maires dans le manque de constructions de logements pose question. Une municipalité se targue dans son magazine municipal d'avoir refusé 22 permis de construire sur sa commune après seulement un peu plus d'un an de mandat. La nouvelle équipe municipale de Villemomble est fière d'annoncer à ses administrés avoir freiné la construction puisque deux pages y sont consacrées dans le dernier magazine de la mairie.
L'urbanisme en quelques chiffres à Villemomble: 22 permis refusés, même annulés alors qu'ils avaient été engagés sous le précédent mandat. Et 22 permis refusés cela équivaut à 636 logements qui ne sortiront pas de terre. Cinq autres ont été révisés. Et en plus d'avoir modifié le plan local d'urbanisme, la municipalité se vante aussi d'avoir rédigé, et donc imposé, une charte des promoteurs. L'exemple type de ce que dénoncent justement ceux qui construisent...
Une ville tendue
Pourtant, Villemomble est une ville où il faudrait construire davantage. Les chiffres sont sans appel. En regardant le ratio entre le nombre de constructions et le nombre de ménages sur les 20 dernières années, on constate un réel déséquilibre, avec moins d'un logement pour chaque nouveau ménage.
Et lorsque l'on regarde le taux de vacances des logements dans la ville, on est à peine au-dessus de 6%, ce qui est extrêmement faible, 2 points en dessous de la moyenne nationale.
Villemonble est l'une des villes les plus tendues du département. Saint-Ouen, Bagnolet ou le Près-Saint-Gervais qui collent Paris, sont par exemple des marchés plus équilibrés entre l'offre et la demande. C'est d'ailleurs pour cette raison que Villemomble bénéficiera d'une des nouvelles gares du Grand Paris avec l'extension de la ligne 11 du métro.
Quelles sont les raisons du maire ?
Alors pourquoi le maire ne veut-il pas construire davantage ? Jean-Michel Bluteau, le maire de la ville, avance évidemment plusieurs arguments. D'abord, il rappelle qu'en terme de logements sociaux, il est dans les clous de la loi SRU et respecte toutes les obligations en la matière. Cette loi impose en effet de respecter un quota de 25% de logements sociaux. Il considère que sa problématique est financière. Lorsque l'on construit, on accueille plus d'habitants et il faut créer ou améliorer les services publics qui vont avec. Or les dotations ont, nous dit-il, baissé de 10% ces 4 dernières années.
Cet élu reconnaît qu'il y a aussi la nature de ce que veulent les nouveaux habitants qui explique le manque de permis de construire, d'autant plus depuis la crise sanitaire qui préfèrent la maison et le jardin. Ce qui est loin donc des immeubles et des 636 logements refusés à la construction. Jean-Michel Bluteau se défend en tous les cas de tout intérêt électoraliste.
Un enjeu électoral
La construction de logements est pourtant un enjeu électoral. On constate que certains maires semblent croire au fameux adage "maire bâtisseur, maire battu". Et à l'aube de chaque élection municipale, la délivrance de permis de construire s'effondre littéralement. Dans notre enquête, il y 2 ans, nous avions d'ailleurs identifié un certain nombre de villes où la construction chutait. Meudon, L'Hay-les-Roses, Saint-Cloud, Bois-Colombes et en région on constatait les mêmes courbes corrélées aux élections à Colmar, Saint-Brieuc ou encore Cagnes-sur-mer...