La Grèce a peur que la Turquie profite du fonds européen sur la défense pour acheter des armes qu'elle utilisera contre elle

Le gouvernement allemand a donné son accord pour vendre des avions de chasse Eurofighter à la Turquie. - John THYS
La Grèce, membre de l'UE, a averti la Turquie voisine qu'elle pourrait bloquer son accès à un fonds d'armement européen à moins qu'elle ne garantisse que ces armes ne seront pas utilisées pour cibler Athènes.
Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis a déclaré, mercredi 23 juillet dans la soirée, que son pays n'autoriserait pas la Turquie à participer au programme européen de fonds communs d'armement (SAFE) si elle continue à menacer la Grèce et à remettre en question sa souveraineté en mer Égée.
Une relation historiquement tendue entre la Turquie et la Grèce
"La Grèce ne le permettra pas", a déclaré le dirigeant conservateur sur la chaîne privée Skai TV. "L'unanimité est requise (au sein de l'UE, ndlr) pour qu'un pays tiers puisse entamer des négociations" pour participer au programme SAFE, a-t-il rappelé, dans une allusion à un possible veto grec.
Toutes deux membres de l'Otan, la Grèce et la Turquie maintiennent toutefois historiquement des relations tendues en raison de divergences sur la souveraineté en mer Égée, l'exploration énergétique et la migration.
La Turquie, candidate à l'adhésion à l'UE, est techniquement éligible pour accéder au programme SAFE sur le financement de l'industrie de défense européenne doté de 150 milliards d'euros.
Conçu pour renforcer les capacités de défense européennes et réduire la dépendance à l'égard de l'Otan et des États-Unis, ce programme prévoit des prêts de 150 milliards d'euros pour financer en commun des achats et des projets d'armement.
Des pays tiers avec lesquels l'UE entretient un partenariat en matière de sécurité et de défense, comme la Turquie, ont la possibilité de bénéficier de ce programme.
Une réaction à la levée du veto allemand sur la vente d'Eurofighter à la Turquie
Cette mise en garde d'Athènes intervient après le feu vert de Berlin mercredi pour la livraison d'avions de combat Eurofighter à la Turquie. La Turquie avait négocié pendant plusieurs années l'achat de 40 Eurofighter fabriqués par un consortium comprenant l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Espagne et l'Italie.
Mais tous les membres du consortium doivent approuver la vente, et l'Allemagne, qui s'est heurtée à la Turquie au sujet de la guerre d'Israël à Gaza, s'y était jusqu'alors opposée. Après le lever du veto allemand mercredi, les ministres de la Défense turc et britannique ont signé à Istanbul un accord préliminaire pour la livraison des avions.
N'étant pas membre du consortium, la Grèce ne dispose d'aucun levier pour bloquer cette vente mais entend toutefois peser sur ses partenaires pour poser ses conditions, laisse entendre le Premier ministre.
"La Turquie est un grand pays avec une industrie de défense puissante. Et si quelqu'un pense pouvoir bloquer un achat d'équipement de défense par la Turquie, il se trompe profondément, cela est impossible", a affirmé à ce propos Kyriakos Mitsotakis.
"Ce qui peut arriver, cependant, c'est que nous allons sensibiliser nos partenaires européens pour qu'il y ait des critères et des conditions concernant la manière dont ces avions seront livrés et potentiellement utilisés. Et je crois que nous allons y arriver", a-t-il souligné.