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La BCE doit-elle s'inquiéter de l'ultimatum lancé par les juges allemands?

Mardi, la Cour constitutionnelle allemande a donné trois mois à la Banque centrale européenne pour justifier ses rachats d'actifs, qui ne font théoriquement pas partie de son mandat, selon les juges allemands.

C'est un coup dur porté à l'action de la Banque centrale européenne (BCE), au pire moment. Les juges de la Cour constitutionnelle allemande considèrent certes que l'institution n'a pas enfreint son interdiction de financer les états mais qu'une partie de ses programmes de rachats sont tout de même illégaux.

La BCE est, en effet, régulièrement accusée en Allemagne d'outrepasser les prérogatives de son mandat, en aidant les Etats de la zone euro, les plus fragiles en Europe du Sud par son rachat d'actifs (Quantitative Easing).

Les juges allemands somment donc la BCE de prouver, sous 3 mois, que ses rachats d'actifs sont bien justifiés et proportionnés, faute de quoi, la Banque centrale allemande devra stopper tout rachats, voire revendre les titres qu'elle a acheté jusqu'ici.

Les analystes restent optimistes

Une telle décision serait perçue comme un signal très négatif par les marchés et risquerait de freiner l'action de la BCE à un moment où ses rachats sont essentiels pour soutenir l'économie et éviter une crise des dettes souveraines.

Pour autant, les analystes restent optimistes. Pour eux, il s'agit avant tout d'un coup de pression politique face à une opinion allemande toujours très critique vis à vis de la BCE. Les juges allemands n'ont pas totalement fermés la porte et la BCE n'aura aucun mal à justifier son action, nous dit un expert.

Autre point important: les juges allemands précisent bien que cette décision ne concerne pas les mesures prises en mars pour faire face à la crise du coronavirus.

Tensions sur les taux

Mardi soir, la BCE a maintenu son intention de faire "tout le nécessaire dans le cadre de son mandat". Une façon de rappeler que cette décision allemande ne la fera pas dévier de son programme. Surtout l'institution présidée par Christine Lagarde a rappelé que le droit européen primait sur le droit national : la Cour de justice européenne avait validé en décembre 2018 ses interventions sur le marché de la dette. Une décision rejetée par les juges allemands.

Reste que le bras de fer est un mauvais signal pour la zone euro et pourrait raviver les inquiétudes connues lors de la crise grecque. Les taux italiens ont bondi aussitôt après cette annonce...

Caroline Morisseau avec Thomas Leroy