Taux négatifs : faut-il laisser filer les déficits ?

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C’est un vieux débat qui est soudainement revenu sur la table le 18 juin dernier. Ce jour-là, pour la première fois de son histoire, le taux d'emprunt à 10 ans de la France est passé en territoire négatif. A la date du 5 juillet dernier, il était indiqué à -0,0830%… En clair, la dette française sur 10 ans promet de belles économies pour l'Etat !
De quoi donner des idées à certains. A commencer par l’ancien chef économiste du FMI, Olivier Blanchard, qui prône de revoir la politique budgétaire. « Lorsque les taux d’emprunt sont bas, la dette publique s’accumule moins vite, son coût pour le budget et l’économie est plus faible » résume-t-il dans le Monde. Alors lorsqu’ils sont négatifs, c’est encore mieux pour les finances publiques.
Et si c’était le meilleur moyen de réaliser de grands investissements ? Le keynésianisme revient en force... « Comment les Etat doivent-ils utiliser cet argent, sachant qu’il y a des besoins d’investissements dans la transition écologique » souligne Mathieu Plane, économiste à l’OFCE, sur le plateau des Experts, laissant entendre que cette manne pourrait être utile pour l'executif.
« Pas ‘open-bar’ »
L’idée en fait frémir plus d’un…. « Il y a très peu de pays en Europe qui ont les moyens d’utiliser de manière active la politique budgétaire » souligne Benoit Cœuré dans 12H, l’Heure H. Et de trancher : « L’Allemagne en fait partie, la France et l’Italie n’en font pas partie. » Il est vrai que l’endettement de l’Allemagne est largement inférieur à celui de la France.
D’autant plus que les taux ne resteront pas en territoire négatif éternellement. « On arrive à oublier qu’on s’endette beaucoup plus » tranche de son côté Didier Migaud, Premier Président de la Cour des comptes, qui met en garde contre cette tentation. « Les taux d’intérêt peuvent rester bas pour 2019 donc peut-être que cela permettra quelques marges de manœuvre mais ces taux peuvent remonter et une nouvelle crise peut survenir, d’où la nécessité de rester prudent. »
« Ça ne veut pas dire c’est ‘open bar’», répond Mathieu Plane. « Mais on est obligé de repenser la politique économique si on considère que pendant 10 ans on a des taux à zéro. Il faut l’utiliser comme un levier, il ne faut pas le subir. »
La meilleure solution se trouve peut-être dans un entre-deux. « Des investissements ? On n’en est pas là. La question est plutôt de savoir s’il faut réviser sa stratégie de réduction de dette » juge Xavier Timbeau, directeur principal de l’OFCE. Pour rappel, la dette française s’établit désormais à 99,6% du PIB…