Une amende de 2,4 milliards d’euros: comment un Français a défié (et a fait plier) Google

Le 10 septembre dernier, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), tribunal de dernière instance, a confirmé l’amende de 2,4 milliards d’euros contre Google. Elle avait été infligée au géant américain en 2017 pour avoir favorisé son propre service de comparaison de produits, Google Shopping, au détriment de la concurrence.
Une accusation qui remonte à 2012, avec Olivier Sichel, à l’époque dirigeant du comparateur de prix LeGuide. Alors que ce service de comparaison était numéro 1 en Europe et que la société se développait bien, Google a placé son comparateur de prix dans son moteur de recherche tout en réduisant la visibilité de ses concurrents.
La société s’est ainsi retrouvée à la 3e page sur le moteur de recherche, puis à la 15e et à la 25e.
"Un abus de position dominante", accuse Olivier Sichel, actuellement directeur général délégué de la Caisse des Dépôts, sur BFM Business.
Un impact plus important que l'amende pour Google
Olivier Sichel a alors fédéré d’autres acteurs et déposé plainte contre Google auprès de l’Europe. Le commissaire à la concurrence de l’époque, Joaquin Almunia, a commencé à négocier avec Google, qui a "fait des propositions de remède en essayant d’éviter l’amende et le procès", explique l’ancien dirigeant de LeGuide.
Ce n’est qu’après l’arrivée de Margrethe Vestager en tant que commissaire à la concurrence que la situation s’est vraiment débloquée. Son prédécesseur ayant quitté la Commission européenne en lui confiant ce dossier, elle a échangé avec Olivier Sichel, qui lui a exposé les faits et expliqué le fonctionnement des algorithmes et du moteur de recherche. C’est ce qui a abouti à la condamnation de Google. L’entreprise a fait des recours, mais la CJUE a donné raison à Olivier Sichel et aux autres acteurs.
"Cette décision de condamnation, elle ouvre la voie à des dommages et intérêts, et toutes les entreprises, tous les comparateurs de prix qui ont été victimes ont gardé trace de cet abus de position dominante", a-t-il affirmé, ajoutant qu’elle "ouvre une nouvelle phase 12 ans après".
Autrement dit, les comparateurs de prix victimes de cet abus de position dominante vont désormais pouvoir faire "des demandes de réparation qui vont être colossales parce que ce cas a duré des années et que ces entreprises étaient extrêmement saines".
L’impact pour Google est ainsi plus important que l’amende car cette condamnation "a cassé la stratégie de Google”, assure Olivier Sichel. "Si on veut stimuler la concurrence, il faut des règles et on ne peut pas faire levier sur une position dominante et en abuser", conclut l’ancien dirigeant de LeGuide.