Pourquoi Ross Ulbricht, le fondateur du "Ebay de la drogue", est-il si populaire?

Après avoir passé plus d’une décennie en prison, Ross Ulbricht a retrouvé la liberté. Il a été gracié par Donald Trump ce mardi 21 janvier, comme ce dernier l'avait promis lors de la convention nationale du Parti libertarien, en mai dernier. Une libération qui a été fêtée par ses très nombreux supporteurs et largement relayée sur les réseaux sociaux.
Né en 1984, Ross Ulbricht a grandi au Texas. Il est connu pour avoir fondé le site Silk Road (route de la soie), site souvent surnommé le "Ebay de la drogue" et qui lui a valu d'être arrêté en octobre 2013 puis condamné à la réclusion à perpétuité, sans possibilité de libération, en 2015.
"Donner aux gens la liberté de faire leurs propres choix"
Alors qu'il était âgé de 26 ans, en 2011, Ross Ulbricht a lancé Silk Road car il pensait que "les gens devaient avoir le droit d'acheter et de vendre ce qu'ils voulaient, tant qu'ils ne nuisaient pas à autrui", comme il l'a déclaré dans une lettre adressée au juge avant sa condamnation et relayé par le site Free Ross, dédié à sa libération. Dès sa vingtaine, il a développé "un profond intérêt pour la philosophie libertaire", s'intéressant de près aux "idées de gouvernement limité et de liberté individuelle, "de respect de la vie privée et de libre marché", selon ce site.
"Silk Road était censé donner aux gens la liberté de faire leurs propres choix, de poursuivre leur propre bonheur, comme ils l'entendaient. Ce qu'il est devenu, c'est en partie un moyen pratique pour les gens d'assouvir leur dépendance à la drogue", a-t-il déploré dans sa lettre.
Ce gigantesque marché noir a en effet permis à des dizaines de milliers de personnes d'acheter anonymement de l'héroïne, de la cocaïne ou encore de la LSD, mais aussi de se procurer des faux documents et d'autres produits illégaux. Cela, en payant en bitcoin et en restant anonymes.
"Silk Road était un bazar numérique pour les biens et services illégaux. Les acheteurs et les vendeurs ne pouvaient visiter le site web qu'à l'aide d'un navigateur appelé Tor, un réseau conçu pour dissimuler la localisation de ses utilisateurs", a indiqué le FBI sur une page résumant l'affaire Ross Ulbricht. Selon l'agence, le site a généré "des centaines de millions de dollars de vente".
Un prisonnier soutenu par les cercles libertaires
L'identité du créateur de Silk Road a été découverte à cause d'un message à propos du site publié par un utilisateur sur un forum en ligne et découvert par un agent du fisc en 2011. Quelques mois plus tard, ce dernier a remarqué que ce même utilisateur avait publié une offre d'emploi, demandant aux personnes intéressées d'envoyer leurs réponses à un compte enregistré au nom de Ross Ulbricht.
Alors qu'il était incarcéré, les cercles libertaires se sont emparés de sa cause, estimant que sa condamnation était un excès de pouvoir du gouvernement et une atteinte aux principes du libre marché. Le Parti libertarien a ainsi demandé sa grâce en 2018, considérant qu''héberger un site web sur lequel des adultes peuvent acheter et vendre de la drogue ne devrait pas être un crime".
La même année, sa famille a également lancé une pétition en ligne, signée par plus de 607.000 personnes, pour que Ross Ulbricht. Mais, cela n'a rien changé. Tout comme la lettre qu'il a envoyée à Joe Biden en 2022, dans laquelle il assurait être devenu "un homme différent" et lui demandait de commuer sa peine.
Ross Ulbricht a ainsi fêté ses 40 ans en prison, en 2024, espérant "avoir une seconde chance de liberté avant la fin de la prochaine décennie", comme l'avait indiqué sa femme sur le compte X qu'elle gère en son nom. Ayant placé ses espoirs en Donald Trump depuis sa promesse, son souhait a été exaucé, pour le plus grand bonheur de sa famille.
"ROSS ULBRICHT EST LIBRE!!! Notre immense gratitude au président Trump pour avoir donné une seconde chance à Ross et à tous ceux qui nous ont soutenu tout au long de ces années. Du fond du coeur, MERCI!!!", a-t-elle écrit sur le site Free Ross.
Pourquoi un tel enthousiasme autour de cet homme? Pour les libertariens américains, il est devenu le symbole d'une injustice profonde. La grâce de Donald Trump est ainsi une promesse de campagne faite à la convention libertarienne durant la campagne présidentielle.
Autre soutien de taille: les amateurs de cryptomonnaies. Silk Road, bien qu'illégal, a en effet été un propulseur pour le Bitcoin, dès sa création en 2009.
Pour le moment, le principal intéressé n'a pas réagi publiquement à sa libération. "Si je sors de prison, dans plusieurs décennies, je ne serai plus le même homme et le monde ne sera plus le même. Je ne serai certainement pas le preneur de risques rebelle que j'étais lorsque j'ai créé Silk Road", assurait-il cependant dans sa lettre adressée au juge. Reste à voir ce qu'il fera maintenant qu'il a retrouvé sa liberté.