Le logiciel du fisc pour détecter les piscines non-déclarées fait de très nombreuses erreurs

Le logiciel de détection des piscines n'est pas au point - Pexel
MAJ avec la réponse de la DGFIP ci-dessous*
Serait-ce un échec pour la chasse aux piscines non-déclarées vues du ciel? La Direction général des finances publiques avait demandé à Google de créer un logiciel d'intelligence artificielle pour détecter les piscines. Ce logiciel avait été mis en place début 2021 par la firme américaine et développé ensuite par Capgemini. Avant eux, Accenture s'était essayé à l'exercice mais avait abandonné faute de résultats corrects lors de l'expérimentation dans trois départements, raconte Le Parisien. Google et Capgemini n'y parviennent pas mieux donc. Damien Robinet, secrétaire national du syndicat Solidaires finances publiques, le reconnaît: "Il y a beaucoup d'erreurs". En effet, ce taux atteindrait 30% dans les neufs départements où le logiciel était expérimenté.
Et la raison est simple. Avec les confinements, les gens ont massivement acheté des piscines et elles sont souvent hors sol. Ces installations ne sont pas imposables. Or, le logiciel n'a pas ce niveau de précision.
Un budget qui a explosé
Une géomètre du service des Bouches-du-Rhône, précise au Parisien: "Après notre recoupage, dans les Bouches-du-Rhône, près de 8500 ménages vont être taxés d’environ 300 euros, selon la commune et le secteur, pour une piscine de 4 m sur 8 m, poursuit la géomètre. Et si la marge d’erreur devrait être faible, il y aura dans le lot des piscines taxées qui ne devraient pas l’être, faute de contrôle précis sur le terrain…". Les géomètres devront vérifier grâce à des photos aériennes ou Google Street View.
Le Parisien croit savoir que le contrat avec Capgemini pourrait être suspendu. Car l'idée, à terme, était de détecter les bâtiments isolés mais là le taux d'erreur est de 80%. Frédéric Scalbert, de la CGT, affirme: "Dans l’un des départements où a lieu l’expérimentation, on a relevé 80% d’erreurs: l’IA (intelligence artificielle, NDLR) voyait des bâtiments à taxer à la place de bâches, de routes, de trottoirs, de parkings ou de dalles".
Le coût initial du projet, qui était de 20 millions, aurait déjà atteint 40 millions d'euros. Alors que selon Frédéric Scalbert, "ce qui est exaspérant c’est qu’en interne, la DGFiP a les ressources pour faire ce travail".
*Réponse de la DGFIP :
L'outil est développé en interne à la DGFiP, qui seule manipule les données et actions vers les contribuables. L'appel à Cap Gemini et Google se fait sur certaines briques qui sont en open source. Il est donc inexact de dire qu'il est développé par ces 2 prestataires. Tout savoir sur le projet https://www.impots.gouv.fr/actualite/1-les-grandes-lignes-du-projet-du-foncier-innovant-afin-de-garantir-une-meilleure
A ce stade de l'expérimentation, ce sont des lettres de demandes d'information qui sont envoyées aux contribuables et non des lettre de redressements (c'est un détail très important). C'est une phase de dialogue (procédure contradictoire) qui permet aux usagers de confirmer ou d'infirmer les informations récupérées via cet outil. Cela va prendre encore plusieurs semaines. C'est à l'issue de ce dialogue que la taxation (ou la non taxation) sera notifiée. Les contribuables auront encore la possibilité de contester et de faire une réclamation.
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Concernant la surface de la piscine calculée par l'algorithme : pour le calcul de l'imposition, l'administration retient la surface déclarée par le propriétaire, ou, à défaut de déclaration, la surface calculée par un opérateur à l'appui de la prise de vue aérienne. Les surfaces calculées par l'algorithme ne sont donc pas retenues pour le calcul de l'imposition.
De même, le % d'erreur évoqué est variable selon les départements et en phase de test. Cela ne préfigure pas du tout des performances finales de l'outil.
Cet outil a été développé pour venir en appui du travail de nos agents, notamment en automatisant certaines tâches et en regardant là où nos géomètres n'ont pas le droit d'aller (à savoir à l'intérieur du domicile du contribuable. Cela leur permet se concentrer sur les missions les plus importantes comme l'analyse et l'évaluation.
L'imposition est donc établie sur la base de la déclaration du propriétaire. C'est seulement lorsque ce dernier ne remplit pas ses obligations suite aux opérations de relance qu'une imposition d'office est établie. Le contrôle sur place de la présence ou non d'une piscine taxable est donc réservé aux seules situations où le propriétaire contesterait, pendant la phase contentieuse, le caractère imposable de sa piscine.
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Un bilan de cette expérimentation sur ces 9 départements devrait être présenté d'ici la fin du 1er semestre 2022.