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Zéro artificialisation nette: le Sénat ne veut pas de l'objectif fixé à 2031

Chaque année, la France perd 20.000 à 30.000 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers sous la pression des activités humaines.

Chaque année, la France perd 20.000 à 30.000 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers sous la pression des activités humaines. - RMC

Les sénateurs dénoncent l'absence d'accompagnement des élus locaux par l'État, mais aussi des calculs d'artificialisation jugés trop complexes. Ils proposent de revenir sur l'objectif intermédiaire de diviser par deux le rythme d'artificialisation d'ici 2031.

La mise en oeuvre du "zéro artificialisation nette des sols" (ZAN) pour lutter contre la bétonisation des terres se heurte à des "difficultés concrètes" d'application, selon un rapport du Sénat mercredi, qui plaide pour l'abandon de l'objectif fixé à 2031, jugé "peu atteignable".

Inscrit dans la loi Climat de 2021, le ZAN vise à stopper l'étalement urbain d'ici 2050. À cette date, toute nouvelle surface urbanisée devra être compensée par la renaturation d'une surface équivalente. Un objectif intermédiaire prévoit de diviser par deux le rythme d'artificialisation d'ici 2031 par rapport à la période 2011-2021.

Selon le groupe transpartisan de suivi de la mise en oeuvre du ZAN, qui réunit 18 sénateurs de trois commissions, il existe un "large consensus autour de la nécessité de sobriété foncière".

Mais malgré l'assouplissement introduit par la loi du 20 juillet 2023, qui garantit notamment un hectare par commune, de sérieuses difficultés d'application persistent, nécessitant "des évolutions législatives et réglementaires", estime leur rapport.

"Au doigt mouillé"

En cause notamment, l'absence d'accompagnement des élus locaux par l'État, "moins aménageur que boutiquier", mais aussi des calculs d'artificialisation jugés trop complexes.

"La stratégie qui a été posée (...) est centralisatrice, arithmétique, et de ce fait elle est injuste pour les territoires qui sont déjà engagés en faveur de la sobriété foncière", a déclaré lors d'un point presse le sénateur centriste du Nord Guislain Cambier.

Si l'objectif de 2050 n'est "pas remis en cause", les sénateurs interrogent la trajectoire, calculée selon eux "au doigt mouillé, sans étude d'impact".

Pour la période 2021-2031, le rapport propose différents outils pour rester "dans le cadre de la loi": possibilité de dépasser de 20% l'enveloppe d'artificialisation autorisée, meilleur financement de la sobriété, exemption du décompte de l'artificialisation de l'industrie "verte" et des nouvelles constructions de logement social.

20.000 hectares artificialisés par an

Ils proposent d'autres outils pour l'après-2031 et plaident pour une approche "venue des territoires", mais s'interrogent aussi sur l'opportunité de nouveaux reports de calendrier, ou sur l'exclusion du décompte de l'artificialisation des grands projets d'envergure nationale.

Zéro artificialisation des sols, bonne idée ? - 13/06
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Lors de son discours de politique générale, le Premier ministre Michel Barnier s'était dit favorable à une nouvelle évolution de la réglementation. "Nous devons faire évoluer de manière pragmatique et différenciée la réglementation 'zéro artificialisation nette' pour répondre aux besoins essentiels de l'industrie et du logement", avait-il déclaré devant les députés.

"Revenir au simple volontarisme des élus locaux pour s'auto-réguler ne marche pas, les chiffres de la consommation nationale actuelle des sols le montrent", a regretté dans un communiqué le groupe écologiste au Sénat, rappelant que le grignotage des terres naturelles, agricoles et forestières consomme "environ 20.000 hectares par an".

MC avec AFP