Tech&Co
Gaming

"C’est stressant, mais important": les Game Awards, le passage obligé pour les jeux ambitieux

placeholder video
Lors de la cérémonie des Game Awards, "Den of Wolves" s’est montré dans un long trailer musclé. Un exercice bien stressant pour les équipes de 10 Chambers qui savent que le faux pas est interdit sous peine de condamner le jeu avant même sa sortie.

S’il y a une chose que Simon Viklund se souviendra de ne plus faire, c’est de monter sur la scène des Game Awards. "C’était une expérience stressante. Lors de ma 2e participation, j’étais très nerveux malgré mes tentatives pour rester calme," raconte le cofondateur du studio 10 Chambers à Tech&Co. "C’est lorsqu’il y a eu le décompte avant que je parle que j’ai paniqué. J’ai réussi à dire ce que l’équipe marketing m’avait demandé, mais j’étais épuisé. C’est là que j’ai appris à ne plus jamais être sur scène."

C’était en 2021 pour GTFO, le premier jeu du studio suédois. Cette année, 10 Chambers était de retour aux Game Awards (TGA), mais pour montrer de nouvelles images de son prochain jeu, Den of Wolves. Fini le jeu de tir à la première personne extrêmement difficile et sélectif, le futur titre est un retour aux sources pour les équipes: un jeu de braquage en co-op à 4 joueurs et des hommes masqués pouvant se montrer sans foi ni loi.

Les Game Awards pour motiver les joueurs comme les équipes

Cela vous rappelle quelque chose? Simon Viklund ne s’en cache pas. Il fut l’un des artisans de Payday et Payday 2 chez Overkill Software avant de partir donner vie à 10 Chambers. "On va forcément être comparé à Payday", ne se cache pas le directeur narratif de Den of Wolves. "Les jeux de braquage et de coopération vont bien ensemble. Ils offrent un plan clair, un groupe de personnes travaillant ensemble, un objectif défini et des ennemis clairs. C’est un espace narratif intéressant."

Il pointe cependant des différences: le côté futuriste, l’obligation de planifier son braquage en devant s’entendre et se coordonner au sein de l’équipe pour définir les stratégies et zones attaquées en amont. Mais aussi un plus grand réalisme dans l’approche tactique qui, si elle échoue, ne permet plus de revenir en arrière (fini l’infiltration si vous avez été repéré, même si vous évitez vos ennemis. Ils savent que vous êtes là!).

Et les spectateurs ont pu en attester lors de la cérémonie de remise des récompenses annuelles du jeu vidéo, jeudi à Los Angeles. "C’est devenu une tradition pour nous d’être aux TGA. Nous avons de bonnes relations avec Geoff Keighley (l’organisateur, NDLR)," reconnaît-il. Dès la Gamescom en août dernier, les discussions débutent et le studio suédois se met au travail pour concevoir rapidement un nouveau trailer.

"C’est très important d’être aux Game Awards et de montrer son travail. C’est pour le marketing évidemment, que tout le monde soit au courant de l’existence du jeu et que les joueurs le mettent sur leur liste de souhaits sur Steam", reconnaît Simon Viklund. Car c’est pour lui, l’un des attraits et atouts de l’événement: se signaler pour inciter les joueurs à montrer leur intérêt pour le jeu sur Steam. "Cela alimente l’algorithme de la plateforme et va booster la recommandation du jeu auprès d’autres personnes. C’est donc important de faire ça. Ça va multiplier les ventes."

Den of Wolves
Den of Wolves © 10 Chambers

Une présence économiquement intéressante, mais aussi au niveau de la motivation des équipes, selon le patron du studio. "Cela fixe des dates-butoirs pour nous aussi en interne et cela nous permet d’avoir un objectif commun sur lequel travailler. Nous sommes avec Tencent, mais ils n’interviennent que très peu, et pas pour nous imposer des dates de rendu", souligne-t-il. "Quand vous avez une date, vous devez faire quelque chose et ça galvanise toute l’équipe."

Le piège de trop vouloir en montrer

Des images rythmées, une musique qui pulse, des séquences de tir et un trailer qui marque les esprits: Den of Wolves s’est donc un peu plus dévoilé pour montrer son ambiance science-fiction, ses séquences de tir en équipe et ses braquages musclés. On a également un peu plus vu la ville de Midway City, paradis financier hautement sécurisé pour conglomérats désireux de se protéger des cyberattaques qui se multiplient dans ce monde ultra-technologique de la fin du XXIe siècle.

Autant d’éléments qui sont mûrement réfléchis en amont lorsqu’ils sont révélés. "Pour être honnête, il n’y a pas beaucoup d’environnements du jeu que nous pouvons montrer pour le moment. Mais nous pensons qu’ils sont suffisamment beaux pour les mettre dans un trailer. Alors il faut choisir le bon angle de vue, les bons ennemis à montrer", reconnaît le patron du jeu. "Il y a donc tellement de choses que vous choisissez de ne pas montrer parce qu’en termes de qualité, ce n’est pas encore ce que vous voulez."

Vous ne verrez donc pas encore de séquences de furtivité, juste de l’action pour sentir l’intensité du jeu "parce que c’est ce qui fonctionne dans une bande-annonce." C’est avant tout le joueur qu’il faut séduire en donnant le ton. Et celui-ci sait se montrer intransigeant. C’est sans doute la plus grande peur pour les équipes. "Faire une bande-annonce, c’est extrêmement stressant. Si elle fuite avant, ce n’est bon ni pour nous ni pour le joueur", confie Robin Björkell, responsable de la communication du studio.

Si vous n’êtes pas sûrs que ce sera dans le jeu, ne le montrez pas. Les joueurs ont de la mémoire… Ils vont décortiquer chaque seconde du trailer et l’analyser. Et quand vous sortez le jeu, ça a l’air différent. Ils sont intraitables là-dessus".

"C’est amusant de les voir aussi passionnés", admet Simon Viklund. "Cela témoigne de leur intérêt. Souvent, cela peut sembler agaçant, mais au final, c’est ce que vous leur avez dit, ce que vous leur avez montré, les infos qu’ils ont. Et ils fondent leur vision du jeu sur ça. Il faut donc faire attention". De l'importance pour 10 Chambers de savoir "se ménager, ne pas trop en révéler ni trop promettre."

Den of Wolves
Den of Wolves © 10 Chambers

Une forme de pression qui, quelques heures avant les Game Awards, met les équipes de Den of Wolves un peu en stress malgré l'habitude de leur 4e participation. Et leur directeur narratif se met, lui, une pression supplémentaire. Il est aussi l’homme derrière la musique du trailer et du jeu. "Pour Payday, c’était devenu une musique assez populaire auprès des joueurs. Je me suis dit que là aussi peut-être. J’ai donc dû 'étendre' la musique du trailer pour en faire un morceau de trois minutes qui pourrait arriver sur Spotify", s’amuse l’intéressé.

Réponse d’ici vendredi pour savoir si le trailer a été bien reçu et la musique aussi. Le jeu, lui, se fera attendre encore un peu sur PC avec néanmoins une phase de beta à venir prochainement.

Melinda Davan-Soulas