Face à des prix immobiliers qui s'envolent, la Corée du Sud décide de relever ses taux d'intérêt

Séoul compte environ dix millions d'habitants intra-muros et 25,6 millions dans son aire urbaine - Leeyan Kym N. Fontano
La banque centrale sud-coréenne a annoncé jeudi une hausse de ses taux d'intérêt, devenant l'une des premières grandes puissances économiques mondiales à augmenter les coûts d'emprunt depuis le début de la pandémie de coronavirus.
La Banque de Corée (BoK) a relevé son principal taux de 25 points de base (soit 0,25 point de pourcentage) pour le porter à 0,75% à l'issue d'une réunion de politique générale, alors que le pays tente de freiner l'endettement croissant des ménages et un marché immobilier qui s'emballe.
Quelques pays ont commencé à relever leurs taux d'intérêt, notamment le Brésil, la Russie, le Chili et le Mexique, et les investisseurs du monde entier surveillent de près le moment où la Réserve fédérale américaine commencera à réduire ses programmes de relance.
Un endettement record
Douzième économie de la planète, la Corée du Sud avait maintenu son taux à 0,5% depuis mai 2020, son plus bas historique. Il s'agit de la première hausse de taux depuis novembre 2018 et elle intervient alors que les autorités financières sont aux prises avec l'endettement croissant des ménages et un marche immobilier en surchauffe ce qui, selon les analystes, pourrait menacer la stabilité économique du pays.
L'endettement des ménages sud-coréens a augmenté de 41.200 milliards de wons (30 milliards d'euros) entre avril et juin pour atteindre le chiffre record de 1.806.000 milliards de wons (1.312 milliards d'euros), soit pratiquement l'équivalent du PIB du pays.
Du côté des prix, la progression est spectaculaire. Entre juillet 2020 et juillet 2021, les prix moyens des maisons dans les principales agglomérations de Corée du Sud (dont Séoul et Daegu), ont augmenté de 26.7%, selon des données de la KB Kookmin Bank et de Naver.com reprises par le journal The Korea Herald. Dans la capitale Séoul, le prix moyen est passé en un an de près de 6.700 euros par mètre carré à environ 8.200 euros, soit une progression de 23%. D'autres villes affichent des hausses encore plus vertigineuses, comme Sejong (+43% sur un an).
"Les prêts bancaires aux ménages ont continué d'augmenter rapidement tout comme le coût des logements à travers tout le pays", a déclaré la BoK dans un communiqué. Le pays a poursuivi une "reprise saine", a-t-elle ajouté, affirmant que "les exportations ont conservé leur dynamisme et que les investissements sont restés importants". Mais les analystes se montrent prudents sur le rythme de la reprise et sur les conséquences de la hausse des taux.
"Calmer le marché immobilier"
"La plupart des pays développés n'ont pas encore relevé leurs taux et je ne pense pas que la situation économique sud-coréenne se soit améliorée", a expliqué à l'AFP Joo Won, chercheur au Hyundai Research Institute. "Cette hausse semble avoir pour objectif de calmer le marché immobilier", a estimé M. Joo, soulignant que des taux d'intérêt plus élevés "pèseront sur les personnes vulnérables".
Lee Seung-euk, chercheur au sein de l'Institut coréen de recherche économique, a estimé que cette hausse n'était "pas une bonne nouvelle" au moment où le pays est confronté à une nouvelle augmentation des cas de coronavirus. "Les règles de distanciation sociale pourraient affecter le comportement des consommateurs et freiner la reprise", a-t-il ajouté.
La banque centrale a maintenu ses perspectives de croissance à 4% pour cette année, mais a relevé ses prévisions d'inflation de 1,8% à 2,1%, laissant présager un possible durcissement de sa politique.
Les politiques monétaires très accommodantes des banques centrales et les injections massives de liquidités sur les marchés ont soutenu les prix des actifs et l'endettement depuis le début de la pandémie. Et plusieurs pays constatent une surchauffe immobilière, à l'instar des Etats-Unis où le prix médian d'une maison dans l'ancien a progressé de près de 18% sur un an en juillet.