HLM : bouleversement en vue pour la loi SRU?

La loi Elan prévoit d'assouplir les règles sur les HLM - AFP
Invitations à aller "plus loin" à droite, accusations de toucher à "un totem" à gauche : la loi SRU qui impose aux communes un quota de logements sociaux, a provoqué d'ardents débats mardi soir à l'Assemblée, le gouvernement assurant tenir à ses "fondamentaux".
Au septième jour consécutif des discussions sur le projet de loi "Elan", les députés ont entamé tardivement les débats sur un article qui prévoit d'allonger de cinq à dix ans la durée pendant laquelle des logements sociaux vendus seront pris en compte dans le quota fixé par la loi SRU (solidarité et renouvellement urbains).
L'idée est de "lever les réticences" à la vente de ces logements sociaux en permettant aux communes un délai pour "reconstituer" leur stock, a plaidé la rapporteure Christelle Dubos (LREM) rappelant que seuls les logements vendus à leurs locataires seront concernés.
600.000 logements en 18 ans
Plusieurs élus LREM sont intervenus pour récuser tout "détricotage" de la loi SRU qui a permis de construire plus de 600.000 logements en 18 ans, tout en jugeant, à l'instar d'Aurore Bergé, "légitime qu'il y ait ici ou là des correctifs".
"Nous faire le procès de bouleverser la loi SRU" en passant ce délai de 5 à 10 ans, "je pense que ça n'est pas très raisonnable", a aussi affirmé le ministre de la Cohésion des territoires Jacques Mézard. "Nous tenons aux fondamentaux de la loi SRU", a-t-il assuré, insistant sur le fait que "l'ossature, l'objectif la finalité de cette loi doit être respectée". "Ne nous faites pas un procès comme quoi on voudrait détricoter la mixité sociale", a lancé le secrétaire d'Etat Julien Denormandie.
Les trois groupes de gauche sont montés au créneau pour tenter de supprimer cet article, mais leurs amendements - les seuls examinés dans la soirée - ont été rejetés par 148 voix contre 23. Dans un vibrant plaidoyer, le communiste Stéphane Peu, a accusé la loi "Elan" de toucher à "un totem". Rappelant que la loi SRU avait été "votée à l'unanimité", il a défendu "un marqueur de notre République sociale" que "jamais aucun gouvernement n'a osé toucher".
"Vous fragilisez la loi SRU", a également déploré Eric Coquerel (LFI), dénonçant une disposition qui "permet de tricher", notamment dans les villes qui ne respectent pas leurs obligations, tandis que le socialiste François Pupponi a reproché au gouvernement d'ouvrir "la boite de Pandore" en voulant toucher à ce texte, même à la marge.
Grosse fatigue chez les députés
"C'est vrai que cet article est dans votre texte quelque chose qui heurte", car "l'obligation de respecter les 25 % de la loi SRU est reportée (...) à dix ans", a aussi relevé Jean-Christophe Lagarde (UDI-Agir), cet élu de Seine-Saint-Denis jugeant que les cinq ans permettaient "de la fluidité", et craignant "dix ans de trou noir".
Plusieurs élus LR sont au contraire intervenus pour inviter gouvernement et majorité à avoir le "courage" d'aller "plus loin", prônant par exemple de revoir à la baisse les quotas imposés. "Le moment est vraiment venu de réviser la loi SRU" qui a révélé plusieurs "défauts", dont le fait d'imposer "de façon uniforme un quota" sans tenir compte des "réalités des territoires", a notamment affirmé Charles de La Verpillière.
La fatigue aidant, plusieurs moments d'agacement ont émaillé les discussions. "Quoi qu'est-ce qu'il y a ?" a notamment lancé François Pupponi à des élus qui interrompaient son intervention, tandis que le ministre s'est emporté contre Stéphane Peu qui s'exprimait pendant son propos, lui lançant notamment qu'il était "trop facile" d'affirmer "urbi et orbi que jamais personne n'avait touché la loi SRU" ce qui est "faux", glissant aussi, "nous sommes tous fatigués".
(AFP)