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Des câbles plus longs et des débits énormes: qu'est-ce que la fibre optique à noyau creux que finance Microsoft?

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Depuis plusieurs années, des chercheurs travaillent à l'élaboration d'une fibre optique pouvant être de plusieurs centaines de kilomètres sans perte de débit.

Une "révolution". Microsoft a annoncé investir dans une équipe de chercheurs afin de concevoir la fibre de demain, via sa filiale Lumenisity, acquise en 2022. Reliée à l'université anglaise de Southampton, elle a pour ambition de proposer des débits largement supérieurs à la fibre actuelle, tout en limitant énormément les pertes malgré les distances qu'elle peut parcourir.

Cette fibre "à noyau creux" vient s'opposer, d'une certaine manière, à la fibre "à noyau solide" conventionnelle. Cette dernière utilise la lumière à travers un câble de verre, lui permettant de se rapprocher d'une vitesse maximale théorique. La fibre à noyau creux, elle, utilise des membranes de verre ultra-minces afin de maintenir le signal dans les conditions les plus difficiles à travers l'air, réduisant les pertes d'énergie, expliquent les chercheurs, tout en augmentant les débits jusqu'à 45%.

Une fibre plus longue et plus performante

Leurs avancées, publiées dans la revue Nature, sont en tout cas suffisamment concluantes pour que Microsoft investisse de l'argent dans le projet, notamment pour ses serveurs Azure.

L'entreprise en a profité pour annoncer auprès de The Register que la perte de signal était minime, une première dans le cas de cette technologie faite pour être déployée sur des centaines, voire des milliers, de kilomètres. A titre d'exemple, la fibre traditionnelle peut atteindre jusqu'à 0,14 décibel de perte par kilomètre. La trouvaille des chercheurs sur la fibre à noyau creux, elle, perd 0,091 décibel par kilomètre. Ce qui signifie que le signal subit moins de perte.

On comprend mieux le pourquoi de cet investissement alors que Microsoft "a un besoin urgent de fibre" et que la société cherche à pousser ses solutions dans le nuage, notamment une version de Windows ne nécessitant pas un ordinateur classique.

Jusqu'à présent, la fibre à noyau creux souffrait d'une perte de 1db par kilomètre, avec pour conséquence une baisse inéluctable des débits et donc une potentielle mauvaise connexion passé les dix premiers kilomètres.

Si cela se concrétise, les chercheurs expliquent que cela pourrait même devenir "une révolution dans les communications optiques". D'autant qu'à la clef, c'est la possibilité de pouvoir relier des zones blanches ou très reculées permettant aux opérateurs de couvrir des lieux peu habités.

Reste qu'une telle "révolution" ne devrait pas avoir lieu tout de suite. Dans des propos remontant à avant le financement par Microsoft, Franciesco Poletti, de Lumenisity, ne voyait pas une telle technologie arriver dans les centres de données avant "au moins cinq ans". Il mettait aussi en avant la difficulté de créer "un standard mondial".

La course est néanmoins lancée: la Chine travaille aussi sur le sujet et a réalisé des avancées similaires.

Sylvain Trinel