Après un clash avec le Sénat, Éric Lombard retire un texte polémique sur la fraude à l'impôt sur les dividendes

Le sujet était au coeur des tensions entre Bercy et le Sénat depuis des mois. À l'issue d'une réunion avec le rapporteur général et le président de la Commission des finances du Sénat, Éric Lombard a annoncé ce jeudi retirer un texte d'application de Bercy contesté par des sénateurs selon lesquels certaines dispositions introduisaient une brèche dans un dispositif de lutte contre le contournement de l'impôt sur les dividendes appelé "Cumcum" adopté dans le budget 2025.
"J'ai décidé de retirer le texte en question, le paragraphe 4 pour être précis, puisque la loi est effectivement précise et permet de protéger les contribuables", a annoncé le ministre de l'Économie lors d'un point presse après une rencontre avec le président de la commission des Finances du Sénat, Claude Raynal (PS), et du rapporteur général de cette commission, Jean-François Husson (LR).
Une fraude de 1,5 à 2 milliards par an
Depuis plusieurs mois, le Sénat et Bercy s'écharpent sur le dossier explosif des "CumCum". En ligne de mire: un manque à gagner fiscal estimé entre 1,5 et 2 milliards d’euros par an.
Ce stratégème consiste pour des actionnaires étrangers d'entreprises françaises, à confier temporairement leurs actions à un tiers français - généralement une banque, moyennant rétribution - au moment du versement des dividendes. Cela leur permet d'échapper au prélèvement à la source de l'impôt dû en tant que non-résident. Le mécanisme voté dans le budget 2025 remédie à cette faille en imposant que la retenue à la source s'applique aux "bénéficiaires effectifs".
Mais le texte d'application publié par l'administration fiscale permettait des exceptions, notamment lorsque les banques ne connaissent pas les bénéficiaires des dividendes ou en exonérant les "marchés réglementés" d'appliquer cette disposition. La rédaction de cette texte d'application paru en avril dans le Bulletin officiel des finances publiques (Bofip) précisait notamment que ce dispositif ne s'appliquait pas sur les "marchés réglementés", ou lorsque "l'établissement payeur ne connaît effectivement pas sa contrepartie".
Pour les parlementaires, cette formulation introduisait une brèche, tandis qu'Eric Lombard défendait sa conformité par rapport à la loi et qu'elle assurait une "solidité juridique". Dans une déclaration transmise à l'AFP le 8 juillet, le président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, Eric Coquerel (LFI), avait également estimé que "Bercy n'a pas adopté la loi votée mais la loi telle qu'il voulait l'amender".