A quoi ressemble la promotion qui vient d'intégrer l'ENA?

Les locaux de l'ENA, à Strasbourg, en 2013 - Patrick Hertzog - AFP
La très prestigieuse Ecole nationale d'administration (ENA) vient de publier un rapport qui dresse un portrait-robot de sa promotion 2015-2017. Les 90 élus suivent leur scolarité à Strasbourg depuis le mois de janvier et y resteront deux ans, après avoir été sélectionnés drastiquement. Leurs successeurs doivent d'ores et déjà se préparer car les inscriptions pour les concours d'entrée de 2016 débutent ce mardi.
Les candidats fraîchement admis sont âgés de 21 à 46 ans. Ils ont été les premiers à tester une nouvelle formule de concours, qui comprend notamment une épreuve orale collective d'interaction qui doit permettre aux candidats de sortir des postures et des stéréotypes. Première observation, la ténacité n'est pas la caractéristique principale de tous les aspirants: 1.517 personnes étaient sur la ligne de départ - c'est un peu moins qu'en 2014 -, et... 950 seulement étaient encore là au dernier jour des épreuves!
Une place laissée vacante
Les 90 qui ont franchi la ligne d'arrivée ont 30 ans en moyenne: 25 ans pour les 43 reçus du concours externe (les étudiants), 33 ans pour les fonctionnaires qui passaient le concours interne et 36 ans pour les 9 reçus issus du privé, ceux du "troisième concours". A noter: le jury a laissé un poste vacant à l'issue concours interne, qui a vu 37 admis alors que 38 places étaient à pourvoir!
La parité est encore un objectif lointain pour les énarques: les femmes ne représentent que 36% de la nouvelle promotion. L'école avait atteint 45% de femmes en 2013, mais plafonnait à peine à 29% l'an passé.
D'où viennent les étudiants? 67,5% des admis sont diplômes d'un Institut d'études politiques (IEP), trois sont titulaires d'un doctorat. Les lauréats issus du secteur privé travaillaient dans l'audit, le conseil, l’inspection et le contrôle de gestion. "Ont également été admis un avocat, un ingénieur, une 'program office manager' et un spécialiste des systèmes d’informations", précise le rapport.
Des candidats un peu lisses
L'ancien énarque et président des jurys Jean-Paul Faugère, qui signe le rapport, remarque que ces têtes pensantes destinées aux plus hautes fonctions sont peut-être un peu trop bien formées.
"Le jury s’est parfois interrogé sur les conseils qui ont pu être donnés en amont des épreuves aux candidats, en se demandant s’il ne leur était pas trop fréquemment recommandé d’adopter un profil 'lisse' sans aspérité et, somme toute, dépourvu de toute originalité", est-il noté dans le document.
Le jury insiste sur le risque de "formatage" des candidats, déplore "le conformisme répétitif de certaines copies", et regrette "la qualité des propositions (...) trop fréquemment insuffisante". L'ENA précise qu'elle entend sélectionner "des personnalités imaginatives capables de s’engager et de convaincre" et pas "de simples observateurs". Par ailleurs, les candidats semblent avoir déçu les correcteurs sur les questions européennes et de finances publiques, ce qui peut s'avérer problématique pour de futurs hauts fonctionnaires.
Au vu des sujets, il y a quand même de quoi pardonner aux candidats leur manque d'originalité. Il fallait plancher par exemple sur des questions telles que: "Pluralisme juridique et droits fondamentaux: quels enjeux?", "L'Etat doit-il être moral?", "Doit-on attendre de l’Etat qu’il protège le citoyen de tous les risques?", mais aussi disserter sur "L’objectif national des dépenses d’assurance maladie".