Baltimore: la garde nationale déployée

Des voitures incendiées, lundi 27 avril, à Baltimore, dans le Maryland. - Andrew Burton - Getty Images North America - AFP¨
Des scènes d'émeutes et de chaos. La ville de Baltimore a été, lundi, le théâtre de violences et de pillages, qui ont éclaté peu après les obsèques de Freddie Gray, mort le 19 avril des suites de son interpellation par la police. Pour tenter de ramener le calme, alors que plusieurs bâtiments de la ville ont été incendiés, les autorités de l'Etat du Maryland ont annoncé dans la soirée le déploiement massif de la garde nationale et imposé un couvre-feu nocturne pour ramener le calme.
> Couvre-feu chaque nuit pendant une semaine
Les violences, circonscrites dans un quartier du nord-ouest de la ville, ont fait 15 blessés parmi les policiers, dont deux ont dû être hospitalisés, et mené à 27 arrestations. Selon le journal local The Baltimore Sun, les policiers blessés l'ont été par des individus très jeunes.
Un couvre-feu va être instauré chaque nuit à compter de mardi à 22 heures locales (4 heures du matin, heure française, mercredi) jusqu'à 5 heures du matin, et ce pendant une semaine, a également annoncé la maire.
La garde nationale, qui est une force paramilitaire, va faire l'objet d'un déploiement "massif", a confirmé lors d'une autre conférence de presse, Linda Singh, patronne de cette force. Un responsable de la police du Maryland a, en outre, indiqué que l'Etat avait requis jusqu'à 5.500 hommes supplémentaires en renfort.
"Trop de gens ont passé des générations à bâtir cette ville pour qu'on la laisse détruire par des voyous", a affirmé la maire, Stephanie Rawlings-Blake.
> L'état d'urgence déclaré
Le gouverneur du Maryland, Larry Hogan, avait déclaré un peu plus tôt dans la soirée l'état d'urgence, "pour restaurer l'ordre" dans cette ville de 620.000 habitants située à une soixantaine de kilomètres de la capitale fédérale.
Les manifestants "refusent de suivre nos ordres de dispersion", a expliqué la police de Baltimore sur Twitter, où elle a écrit tout au long de la soirée, évoquant des individus "très agressifs et violents", munis de "bâtons, de briques, et d'autres armes".
Les policiers ont été blessés par les projectiles lancés par des jeunes à la sortie de l'école, a expliqué un responsable des forces de l'ordre.
La ville a décidé de fermer toutes ses écoles mardi, selon une porte-parole, au risque de se retrouver avec de nombreux jeunes désoeuvrés et à nouveau prêt à en découdre.
> Plusieurs incendies dans la ville
Des émeutes similaires avaient éclaté à l'été 2014, à Ferguson, dans le Missouri, après la mort d'un jeune Noir non armé, Michael Brown, tué par un policier blanc.
Lundi, à Baltimore, les manifestants ont jeté des pierres et d'autres objets en direction des forces de l'ordre munies de boucliers anti-émeute. Ils ont brûlé des voitures de police, pillé puis incendié un supermarché.
Les images d'un violent incendie qui a détruit un centre pour personnes âgées en construction tournaient en boucle sur les chaînes d'information continue mais rien ne permettait lundi soir de lier cet incident aux émeutes.
> Des menaces de gangs locaux?
Les violences "ne représentent pas la famille Gray, ni les sept derniers jours de manifestations pacifiques, et c'est pour ça qu'on demande à tous ceux qui (y) participent de rentrer chez eux", a affirmé le pasteur Jamal Bryant, qui présidait quelques heures avant aux obsèques du jeune Freddie Gray.
Au moment des funérailles, la police de Baltimore avait annoncé avoir reçu une "menace crédible" de gangs locaux qui auraient "noué un partenariat pour 'éliminer' des policiers". Si le lien n'a pas été établi à ce stade avec les manifestations dans la ville, la police a demandé aux officiers de prendre leurs précautions.
> A Baltimore, 22% des habitants sous le seuil de pauvreté
Freddie Gray est mort le 19 avril des suites d'une fracture des vertèbres cervicales une semaine après son interpellation à Baltimore, qui compte plusieurs quartiers sensibles. Ce décès est le dernier d'une série de bavures policières qui ont ravivé les tensions entre la communauté noire et les forces de l'ordre.
Le pasteur et militant Jesse Jackson, qui a été plusieurs fois candidat aux élections présidentielles américaines, a dénoncé, avant la cérémonie funéraire, une "épidémie de meurtres dans le pays". "Nous sommes devenus trop violents, trop plein de haine", a-t-il dit, dénonçant la pauvreté des villes.
"Très clairement, il fait un lien entre ce qu'il s'est passé à Ferguson, ce qu'il s'est passé plus tard à New York, et ce qu'il se passe aujourd'hui à Baltimore", estime le spécialiste des Etats-Unis François Durpaire, sur BFMTV.
"On peut dire que Baltimore, c'est une échelle encore différente. Ferguson est une toute petite ville, l'aire urbaine de Baltimore c'est 2 millions d'habitants. Sur ces 2 millions, 64% de Noirs, 30% de Blancs. On est à 60 kilomètres de la Maison Blanche, dans le Maryland. Ce n'est donc pas qu'une raciale, c'est aussi une question sociale: à Baltimore, 22% vivent en dessous du seuil de pauvreté. Pour l'ensemble des Etats-Unis, c'est 11%", rappelle l'expert.