L'activité physique peut-elle compenser les méfaits de l'alcool?

Selon l'OMS, les adultes âgés de 18 à 64 ans devraient pratiquer au moins, au cours de la semaine, 150 minutes d’activité d’endurance d’intensité modérée ou au moins 75 minutes d’activité d’endurance d’intensité soutenue. - iStock - Christopher Futcher
Pour améliorer l’endurance cardio-respiratoire, la forme musculaire, l’état osseux, réduire le risque de maladies non transmissibles ou encore de dépression, le sport est l'activité tout indiquée. Ses bienfaits seraient tels qu'ils pourraient également compenser les effets néfastes de la consommation d'alcool, estime une étude menée par plusieurs équipes de chercheurs dirigées par l'université de Sydney.
Selon leurs conclusions, le sport serait efficace dès 150 minutes d’activité d’endurance d’intensité modérée par semaine, soit la recommandation officielle de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). L'étude, la première a porté sur ce thème, révèle ainsi que chez les buveurs d'alcool, l'activité physique peut diminuer les risques de mourir à la fois d'un cancer, et "toutes autres causes de mortalité confondues" (maladie cardiovasculaire, cirrhose).
Les chercheurs ont tiré leurs conclusions à partir de huit enquêtes de santé réalisées au Royaume-Uni sur 36 000 personnes entre 1994 et 2006, dont les données comprenaient l'impact de l'activité physique, ou au contraire de la sédentarité, et l'impact de la consommation d'alcool sur la santé, peu importe le degré et la fréquence de consommation.
Le sport conseillé même pour une consommation modérée d'alcool
"L'activité physique a des avantages importants pour la santé, même en présence de comportements potentiellement malsains tels que la consommation d'alcool, a déclaré le Pr Emmanuel Stamatakis de l'université de Sydney. Parmi les personnes physiquement inactives, nous avons vu que le risque de mortalité par cancer et toutes autres causes était plus élevé, même à des niveaux faibles d'alcool. Nous avons également remarqué que le risque de décès par cancer augmente lorsque la consommation d'alcool augmente. Mais cela n'a pas été le cas chez les personnes physiquement actives."
Par rapport à une personne qui n'a jamais bu d'alcool, même une personne qui en consomme modérément, dans les lignes directrices recommandées (14 unités d'alcool* par semaine pour les femmes et 21 pour les hommes), s'expose à un risque 36% plus élevé de décès par cancer (40% pour les consommateurs excessifs) et 13% plus élevé de décès par toutes autres causes confondues.
Mais ce risque a été compensée chez les personnes physiquement actives, à partir des fameuses 150 minutes par semaine d'activité d'intensité modérée comme la marche rapide.
Ne pas trop miser sur cet effet de "compensation"
Parmi les six catégories de consommation d'alcool graduées dans l'étude (abstinence, ex-consommateur, consommation occasionnelle, consommation dans les lignes directrices, consommation excessive, consommation nocive), seule une consommation nocive d'alcool pourrait refaire surgir le risque de décès par cancer ou toutes autres causes confondues chez les personnes actives physiquement selon l'OMS.
Les chercheurs soulignent cependant que l'exercice physique régulier n'est pas une excuse pour pouvoir boire davantage d'alcool, qui provoquera toujours des dommages sur la santé (accident vasculaire cérébral, hypertension artérielle, cancer de la bouche, du foie, de la gorge).
"Mais étant donné que beaucoup de gens boivent de l'alcool, notre étude donne encore une autre raison d'encourager et de permettre aux gens d'être physiquement actifs et de demander aux décideurs d'investir dans des environnements favorables à l'activité physique", a conclu le Dr Stamatakis.
En France, l'Inpes recommande une consommation d'alcool limitée à 2 unités par jour pour les femmes et 3 unités pour les hommes. Et précise cependant "qu'il n’existe pas de frontière nette entre une consommation d’alcool sans risque et une consommation dangereuse".
* Une unité d’alcool = un verre standard = 10 grammes d’alcool pur
**Institut national de prévention et d'éducation pour la santé