Pourquoi la "majorité numérique" à 15 ans est très complexe à mettre en place

Une majorité numérique pour protéger les enfants sur Internet. Emmanuel Macron a de nouveau abordé ce sujet ce jeudi. Lors de son discours sur l’Europe à la Sorbonne, le président de la République a plaidé pour une "majorité numérique à 15 ans" au sein de l’Union européenne.
"Avant 15 ans, il doit y avoir un contrôle parental sur l’accès à cet espace numérique. Parce que c’est un accès, si on n’en contrôle pas les contenus, qui est le fruit de tous les risques et des déformations d’esprit, qui justifient toutes les haines", a-t-il déclaré.
Un manque de solutions satisfaisantes pour vérifier l'âge
Cette majorité numérique est pourtant difficile à mettre en place. Le gouvernement a déjà tenté de le faire l’année dernière, après l’adoption définitive d’une loi obligeant les réseaux sociaux à vérifier l’âge de leurs utilisateurs et à recueillir le consentement de leurs parents quand ils ont moins de 15 ans. Mais le décret d'application n'a pas encore été publié.
Sans doute parce qu'à ce jour, aucune solution entièrement satisfaisante pour vérifier l’âge des internautes n’a été trouvée. Depuis plus de deux ans, l’Arcom, régulateur des médias, et des éditeurs de sites pornographiques se livrent une bataille judiciaire à ce sujet. L’autorité française souhaite en effet que les sites pour adultes vérifient l’âge de leurs visiteurs afin d’empêcher les mineurs d’y accéder.
Mais les solutions disponibles posent problème, notamment concernant la vie privée des utilisateurs. La Cnil, gardienne de la vie privée des Français, estime par exemple que le recours aux pièces d’identité est "peu respectueux des données personnelles", mais aussi "peu fiable" à cause du risque d’usurpation d’identité.
Mesures contradictoires
Le gouvernement avait également été critiqué par la Commission européenne après l’adoption de la loi sur la majorité numérique. Le commissaire européen Thierry Breton avait exprimé son désaccord avec cette loi, ainsi que la réglementation sur les influenceurs, par rapport au Digital Services Act (DSA) dans une lettre en octobre dernier.
Il avait déclaré que ces deux lois "risquent de fragmenter le marché unique européen que le DSA tend à harmoniser en imposant des restrictions injustifiées à la libre prestation des services (...) qui ne sont pas établis en France", ajoutant que "certaines dispositions de ces lois semblent même [le] contredire".
Thierry Breton avait surtout évoqué la directive sur le commerce électronique de 2000, rappelant que d’après celle-ci, un intermédiaire du net, comme Facebook ou Snapchat, ne doit pas respecter les lois des pays où ses services sont disponibles, mais la législation du pays européen où il est établi.