Cantat sort de sa réserve devant son public parisien

Bertrand Cantat a dit quelques mots à son public du Zénith de Paris ce jeudi soir et adressé quelques piques aux journalistes présents, alors que des manifestants avaient interpellé les spectateurs à l'entrée.
Alors que des militants et des militantes féministes avaient pris position ce jeudi soir devant le Zénith où il donnait le seul concert parisien de sa tournée, Bertrand Cantat, ancien chanteur de Noir Désir et condamné en 2004 pour le meurtre de Marie Trintignant, s'est adressé à son public au début de son tour de chant.
"Merci à vous d'être là malgré tout", a-t-il déclaré devant une salle à moitié remplie (3.000 spectateurs environ), avant de s'en prendre à "ceux qui ne sont pas là pour des bonnes raisons", invitant ces derniers à partir, et aux journalistes.
"Vous avez quelque chose contre moi. Si certains sont en train de jubiler, il y a aucune limite à quel point je vous emmerde...", a lancé le chanteur de 54 ans.
"Bolloré, que j'emmerde..."
Dès le morceau suivant, il attaque la famille "Bolloré", propriétaire de Vivendi et donc à la fois de Barclay, sa maison de disques, et de l'Olympia. Plus tard, il y revient : "Bolloré, que j'emmerde...", glisse-t-il sous les applaudissements, semblant rompre les ponts avec le producteur historique de Noir Désir.
Ses gentillesses, il les réserve pour le public, où les femmes sont aussi nombreuses que les hommes : "Je vous aime, ça c'est sûr", dit-il avant d'ajouter plus tard : "Merci d'être là, malgré toutes les intimidations, toutes les censures, toute la saloperie depuis octobre...."
"On ne peut pas dissocier l'homme de l'artiste"
Ce concert parisien constituait l'un des temps forts de sa tournée entamée en mars, marquée par des manifestations et annulations, notamment des concerts prévus en festivals. Devant le Zénith, des organisations de défense des droits des femmes avaient appelé à un rassemblement, qui n'a finalement réuni qu'une quinzaine de manifestants.
Certains brandissaient des banderoles comme "Pas d'honneur pour les tueurs" ou "Marie Trintignant ne sera plus jamais applaudie", d'autres des photos de l'actrice morte sous les coups de son compagnon. "On ne peut pas dissocier l'homme de l'artiste puisque l'oeuvre même d'un artiste, il y met de sa personne", a estimé Marion Georgel, une porte-parole de l'association.
"On a le droit"
"Il a le droit d'être là, et nous aussi on a le droit !", a pour sa part indiqué Gaëlle, 40 ans, une fan de longue date."Je pars du principe que le droit à l'oubli c'est important. C'est son métier de chanter, c'est ça qu'on oublie", renchérit Camille, 28 ans, pour qui le voir en concert "n'empêche pas d'être féministe".
"Je n'ai aucune raison juridique d'empêcher Bertrand Cantat de chanter", rappelait Daniel Colling, le patron du Zénith. En tant que responsable du Printemps de Bourges, celui-ci avait programmé le rappeur Orelsan en 2009 quand d'autres festivals y avaient renoncé suite à des textes jugés misogynes.
"Le droit à exercer mon métier"
Libéré en 2007 après avoir purgé plus de la moitié de sa peine de huit ans, Bertrand Cantat a progressivement repris son activité artistique à partir de 2010.
Malgré le succès de la tournée avec Détroit il y a quatre ans, la sortie de son album solo, fin 2017, s'est faite sur fond de polémique, à la suite d'une couverture des Inrocks parue en pleine tempête Weinstein.
Une "une" dont Cantat s'est excusé sur Facebook. Dans ce message, il évoquait aussi son "droit à exercer (son) métier", tout en "renouvelant" sa "compassion" à la famille et aux proches de Marie" Trintignant.
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