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Après Fañch, des parents souhaitent faire reconnaître le prénom Derc'hen

(Photo d'illustration)

(Photo d'illustration) - Philippe Huguen-AFP

Des parents bretons souhaitent appeler leur fils Derc'hen mais l'état civil ne reconnaît pas l'apostrophe. Seuls sont admis les points, tréma, accents et cédilles "tels qu'ils sont autorisés par la langue française", précise une circulaire que certains voudraient voir révisée.

Après Fañch, Derc'hen. Nouveau litige à l'état civil pour des parents bretons qui souhaitent que l'apostrophe présente dans le prénom de leur fils soit reconnue, rapporte Ouest France. L'été dernier, au moment de déclarer la naissance du petit garçon à la mairie de Rennes, l'orthographe initiale n'a pas été acceptée.

Derc'hen accepté sous la version Derchen

"Le 21 août 2017 est né notre petit garçon. Nous avions depuis six ans déjà choisi son prénom qui était Derc'hen" (le "c'h" se prononce comme la jota espagnole), alertent les parents dans un courrier adressé à l'association bretonne Skoazell Vreizh, qui a défendu les parents du petit Fañch.

L'apostrophe est refusée par la mairie de Rennes. Afin de respecter les délais de déclaration de naissance en mairie, la famille se résout à supprimer provisoirement l'apostrophe. "La mairie nous avait spécifié qu'il serait possible d'avoir recours par la suite", ajoutent-ils. Le procureur de la République est saisi par la municipalité.

Mais voilà, il refuse l'apostrophe. "Le procureur a demandé à l'officier d'état civil en mairie de ne pas enregistrer le prénom", explique la municipalité de Rennes à BFMTV.com. Un refus justifié par la circulaire ministérielle de juillet 2014 relative à l'état civil.

"Tout autre signe diacritique ne peut être retenu"

Elle précise en effet que les seuls signes diacritiques - un élément adjoint à une lettre - admis sont "les points, tréma, accents et cédilles tels qu'ils sont souscrits ou suscrits aux voyelles et consonne autorisés par la langue française".

"Dès lors les voyelles et consonne accompagnées d'un signe diacritique connues de la langue française sont: à - â - ä- é - è - ê - ë - ï - î - ô - ö - ù - û - ü- ÿ - ç. Ces signes diacritiques peuvent être portés tant sur les lettres majuscules que sur les minuscules. Les ligatures "æ" (ou "Æ") et "œ" (ou "Œ"), équivalents de "ae" (ou "AE") et "oe" (ou OE) sont admises par la langue française."

Et ajoute: "Tout autre signe diacritique attaché à une lettre ou ligature ne peut être retenu pour l'établissement d'un acte de l'état civil."

Une "discrimination linguistique intolérable"

Une décision que dénonce Charlie Grall, président de Skoazell Vreizh. "C'est un prénom breton connu et reconnu depuis des siècles, assure-t-il à BFMTV.com. De nombreux prénoms bretons ainsi que des noms de famille s'écrivent avec un c'h." Il estime que ce refus est une "discrimination linguistique intolérable".

"Le second prénom de l'enfant est William, un prénom britannique. Le procureur n'a pas pour autant demandé à ce qu'il soit traduit en français en Guillaume. À notre époque, ce type de décision est inacceptable. La France a quand même d'autres choses à faire que de chercher des tracasseries aux familles qui veulent donner à leur enfant un prénom issu d'une langue régionale, car cela pourrait aussi tout à fait être basque ou corse". 

L'association a interpellé le ministère de la Justice afin que soit révisée cette circulaire. Mais n'a pas encore obtenu de réponse. Charlie Grall appelle la mairie de Rennes à reconnaître Derc'hen, ce qui ouvrirait la possibilité d'une procédure en appel.

Un précédent cas avait fait beaucoup de bruit. Les parents du petit Fañch, né à Quimper en 2017, avaient dans un second temps obtenu gain de cause auprès de la mairie pour que le tilde soit reconnu à l'état civil. Mais le procureur de la République a débouté la municipalité en septembre dernier. Les parents ont fait appel.

Céline Hussonnois-Alaya