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Covid-19: le Conseil scientifique défend l'auto-isolement des plus âgés, Véran toujours opposé

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Dans un billet publié par la revue médicale The Lancet, Jean-François Delfraissy et quatre autres membres du Conseil scientifique français appellent à opter pour un "contrat social" entre générations.

C'est une nouvelle voix dissonante que prononce le Conseil scientifique, qui guide le gouvernement français dans sa gestion de la crise sanitaire. Dans un billet publié par la revue médicale britannique The Lancet, cinq de ses membres jugent qu'il ne faut plus enchaîner les confinements et les couvre-feux pour combattre le Covid-19. Ils estiment qu'il faut opter pour une solution consistant à inciter les plus âgés et fragiles qui accepteraient à s'auto-isoler.

Ces cinq membres, qui incluent le président du Conseil scientifique, le Pr Jean-François Delfraissy, plaident pour une "nouvelle approche" basée sur "un contrat social clair et transparent" entre les générations, car le Covid-19 pourrait être là pour durer.

"La fin tant attendue de cette crise sanitaire mondiale pourrait bien être continuellement repoussée puisque de nouveaux variants émergent" et risquent de rendre les vaccins moins efficaces, écrivent-ils.

"Approches basées sur la peur"

Dans ce nouveau dispositif, "les plus jeunes générations accepteraient la contrainte de mesures de prévention (comme les masques, la distance physique), à la condition que les groupes les plus âgés et les plus vulnérables adoptent non seulement ces mesures-là mais aussi d'autres, plus spécifiques (comme l'auto-isolement selon un critère de fragilité), afin de réduire leur risque d'infection", jugent-ils.

Créé en mars 2020, le Conseil scientifique a déjà employé ce type d'arguments dans certains des avis qu'il communique régulièrement au gouvernement français pour guider sa politique de lutte contre la pandémie. "Il n'est plus possible d'utiliser une succession de confinements généralisés comme réponse principale à la pandémie de Covid-19", argumentent les signataires.

"Même si (le confinement) est attractif pour de nombreux scientifiques et considéré comme une mesure par défaut par les dirigeants politiques (...), son usage doit être réévalué afin qu'il ne soit plus mis en œuvre qu'en dernier recours", ajoutent-ils en mettant en garde contre "des approches basées sur la peur".

Conséquences "dévastatrices" du confinement

"Jusqu'à présent", relèvent-ils, "les populations ont eu une attitude relativement coopérative, mais leurs doutes et leur méfiance sont visibles dans les mouvements de protestation observés dans plusieurs pays". Ils s'inquiètent des conséquences "dévastatrices" du confinement, notamment du point de vue économique.

"Les conséquences sociales et sanitaires (notamment pour la santé mentale) sont également colossales, en particulier pour les plus jeunes générations, bien qu'elles soient à faible risque" pour le Covid-19.

Outre le Pr Delfraissy, les autres signataires sont Franck Chauvin, président du Haut conseil pour la santé publique, l'anthropologue Laëtitia Atlani-Duault, le virologue Bruno Lina et l'infectiologue Denis Malvy.

"Faisabilité très discutable" selon Véran

Interrogé sur ce billet lors de sa conférence de presse ce jeudi, le ministre des Solidarités et de la Santé Olivier Véran a d'abord tenu à insister sur le fait qu'il avait été signé par "quelques membres" du Conseil scientifique et non pas la totalité.

"La faisabilité d'une telle mesure, et ça a déjà été débattu plusieurs fois depuis un an, elle est très, très, très discutable. La solidarité qu'elle emporte entre les générations l'est tout autant, et l'impact épidémique n'est pas assuré", a-t-il par ailleurs développé, semblant donc écarter toute intention de suivre les préconisations du Pr Delfraissy.

Selon Olivier Véran, il faut avant tout "ne pas relâcher les efforts", même s'il comprend les frustrations des Français, notamment les plus jeunes.

"On aimerait pouvoir le faire, mais si on le faisait maintenant, ce ne serait absolument pas responsable, car nous prendrions le risque de tout fermer dans deux semaines. Je le dis comme je le pense", a-t-il conclu. Fermez le ban.
Jules Pecnard avec AFP Journaliste BFMTV