Macron-Le Pen: le non-choix de l’Eglise catholique jette le trouble

Contrairement à 2002, la Conférence des évêques de France a décidé de ne pas se positionner entre les deux candidats qualifiés au premier tour de la présidentielle.
Ils sont les seuls à ne pas avoir pris position. Contrairement aux institutions religieuses juives ou musulmanes qui ont appelé les électeurs à soutenir Emmanuel Macron face à Marine Le Pen, la Conférence des évêques de France (CEF) n’a pas donné de consigne de vote dans la perspective du deuxième tour de la présidentielle.
L’institution est pourtant la première à avoir réagi à la qualification du candidat d’En Marche! et de celle du FN, dès dimanche 23 avril. Dans un communiqué, son porte-parole déclarait:
"(L’Eglise catholique) n’appelle pas à voter pour l’un ou l’autre candidat mais, en rappelant les enjeux de l’élection, elle souhaite donner à chacun des éléments pour son propre discernement".
Famille, solidarité et réfugiés
Parmi les points d’attention listés par la Conférence des évêques, le soutien à la "famille" et le respect des "liens de filiation", "la préoccupation des plus pauvres, des personnes âgées, des personnes handicapées et des chômeurs" ou encore l’accueil des réfugiés.
Problème: aucun des deux candidats n’intègre à lui seul toutes ces préconisations. Marine Le Pen soigne sa fibre sociale mais sa ligne dure sur l’immigration ne colle pas avec le message de l’Eglise de France. Et si Emmanuel Macron revendique une ligne humaniste sur ce sujet, sa promesse d’élargir les possibilités de recours à la PMA (procréation médicalement assistée) contredisent la position des évêques sur les "liens de filiation".
Malgré la position de la conférence épiscopale, quelques prélats français ont décidé de prendre parti plus clairement. Comme Mgr Marc Stenger. Sans appeler explicitement à glisser un bulletin Emmanuel Macron dans l’une, l’évêque de Troyes a dénoncé le Front national dans un tweet mercredi.
Le 7 mai, quel bulletin de vote ?#Presidentielles2017 1/2
— Marc Stenger (@MarcStenger) 26 avril 2017
- Pas celui de la peur, de la haine, du rejet, du mensonge, de l'exclusion, du repli : c'est l'opposé de l'Evangile #Presidentielles2017 2/2
— Marc Stenger (@MarcStenger) 26 avril 2017
"Du prêchi-prêcha", dénonce Bartolone
Mais ces messages isolés ne suffisent pas à rassurer les opposants au FN.
Sur le plateau de Cnews ce jeudi, Claude Bartolone a fait part de sa déception à l’égard de l’institution ecclésiale française. "C’est du prêchi-prêcha", a jugé le président de l'Assemblée nationale à propos du message de la CEF. Et le socialiste d’ajouter:
"Moi je préfère l’Eglise de 2002, qui a eu le courage de nommer, de dénoncer l’extrême-droite".
De fait, les évêques français avaient fait preuve de moins de prudence il y a quinze ans, à l’occasion du deuxième tour de la présidentielle opposant Jacques Chirac à Jean-Marie Le Pen.
Comme le rappelait La Croix lundi, le président de la Conférence des évêques d’alors, Mgr Jean-Pierre Ricard, avait eu des propos explicites contre le père de Marine Le Pen:
"Dans la période qui s’ouvre, nous devrons tous faire appel à l’intelligence plutôt qu’à l’instinct, au discernement plutôt qu’à la seule spontanéité, à la sérénité plutôt qu’à la peur".
Macron et Le Pen à égalité chez les catholiques
Et si les tiraillements de l’Eglise de France ne faisaient que refléter ceux de ses fidèles? Selon un sondage Ifop pour l’hebdomadaire Pèlerin paru lundi, les électeurs catholiques (pratiquants ou non) ont voté dans les mêmes proportions pour Emmanuel Macron et pour Marine Le Pen au premier tour (22% pour chacun). Loin derrière François Fillon, choisi par 28% d’entre eux.
Les musulmans et les protestants, de leur côté, ont fait des choix plus nets.
Les premiers ont plébiscité Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron, qui récoltent respectivement 37% et 24% de leur voix (17% pour Benoît Hamon, 10% pour François Fillon). Les seconds ont porté Emmanuel Macron en tête, à 30%, devant François Fillon et Marine Le Pen, à égalité à 20%.
Elections législatives 2017
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