La politique sociale de Hollande est une politique… fiscale

Hervé Gattegno - -
On touche aux limites du système Hollande. Il a des choix difficiles à faire, à cause de la crise et des déficits accumulés ; au lieu de les expliquer, il brouille les pistes et finit par décider le contraire de ce qu’il avait promis. Pas de hausse d’impôts en 2014 ? La baisse du quotient familial va conduire au résultat inverse. Adoucir la réforme des retraites de Nicolas Sarkozy ? Il va la durcir. Son objectif est le seul acceptable : la sauvegarde de notre protection sociale. Elle passe forcément par un appel explicite à la solidarité des Français. Encore faut-il que le gouvernement s’impose, lui, un devoir de sincérité.
Autrement dit : la réforme du quotient familial est juste mais le gouvernement ne l’assume pas assez ?
C’est mieux que de ne rien faire ! Il n’y avait que deux mauvaises solutions – comme toujours pour réduire un déficit : baisser la dépense ou augmenter les recettes. En l’espèce, moduler les allocations familiales selon les revenus ou les fiscaliser d’une façon ou d’une autre (faire payer plus d’impôts à ceux qui en profitent le plus). Le fait est que la gauche comme la droite choisissent toujours la solution qui n’exige pas d’économie : la recette, c’est les recettes ! On a beaucoup débattu sur la politique familiale ; à l’arrivée, on n’a rien d’autre qu’une mesure fiscale. C’est-à-dire une hausse d’impôts.
Jean-Marc Ayrault a dit mardi à propos de la future réforme des retraites : « On peut sauver notre modèle social en le réformant et en réduisant les injustices ». Il a raison ?
C’est du prêchi-prêcha social-démocrate mais ça ne veut pas dire grand-chose – la droite, elle, promet toujours qu’on renflouera les caisses en travaillant plus longtemps et que ce sera la dernière fois… En réalité, il n’y a pas de réforme mais des plans de refinancement. Il ne faut pas croire que Jean-Marc Ayrault compte rétablir la justice : en fait, il espère rétablir les comptes… de justesse – nuance. Là encore, l’idéal serait que le gouvernement assume ses arbitrages (même douloureux). Nul besoin d’un rapport de plus (chaque gouvernement en commande un depuis 25 ans). Surtout si c’est pour faire croire à tout le monde que les efforts seront faits par les autres.
Est-ce qu’un gouvernement peut aujourd’hui annoncer que tous les Français vont devoir contribuer davantage sans provoquer immédiatement une mobilisation sociale ?
La pédagogie est toujours préférable à la démagogie. Tous les Français rêvent d’un statu quo dans les prestations et dans les contributions – mais justement, ils rêvent. Pour avoir la solidarité sans abîmer le système, une solution serait de diminuer temporairement certaines allocations (familiales par ex, pourquoi pas certaines retraites, les plus élevées). La plus juste serait de fiscaliser toutes les prestations. Mais tous les gouvernements reculent parce que 50% des Français ne paient pas d’impôt sur le revenu et qu’il faudrait alors changer cela. François Hollande l’avait promis. Mais sa politique sociale a beau être surtout fiscale, elle ne va pas jusque-là…
Ecoutez ici le Parti Pris d'Hervé Gattegno de ce mercredi 5 juin.