Jean-Marc Ayrault "à l'aise en numéro 2"

Le président de la République François Hollande et le Premier ministre Jean-Marc Ayrault sur le perron de l'Elysée le 3 janvier 2014 - -
"Mon inspiration est profondément sociale-démocrate", a répété le chef de l'Etat sans détours lors de sa conférence de presse de mardi dernier. François Hollande qui assume une ligne sociale-démocrate et c’est son Premier ministre Jean-Marc Ayrault qui s’en trouve ravi. "Une ligne que je défends depuis longtemps", a assuré ce dernier lors de ses vœux à la presse lundi soir.
A la fin de l’année 2013 pourtant, après les annonces d’une remise à plat de la fiscalité et la diffusion d’un rapport sur l'intégration sur le site du Premier ministre, la ligne semblait brouillée entre Matignon et l’Elysée. Mais la reprise en main de François Hollande lors de sa conférence de presse début janvier, loin de faire passer Jean-Marc Ayrault pour un "collaborateur", selon la formule de Nicolas Sarkozy à l'encontre de François Fillon, a conforté le Premier ministre.
"La question du remplacement du Premier ministre ne se pose plus, constate Gérard Grunberg, politologue au Cevipof. Jean-Marc Ayrault pourrait même aller au bout du quinquennat puisque la ligne politique défendue par le président de la République est très proche de celle du Premier ministre et que ce dernier, comme Mauroy avec Mitterrand en 1981, n'a pas de problème à être numéro deux".
"C'est François Hollande qui freinait..."
"Il n'y a plus grand monde pour dire, comme il y a un an, que le gouvernement fait totalement fausse route", a même affirmé, revigoré, Jean-Marc Ayrault.
"Le Premier ministre souhaitait aller dans ce sens depuis plusieurs mois, précise Gérard Grunberg. C'est François Hollande qui freinait, soucieux de ménager les équilibres, avant de changer de cap, constatant l'échec de la politique menée depuis 18 mois".
Toutefois, le tournant pris lors du grand oral a fait tousser à gauche de la gauche. Jean-Luc Mélenchon ou encore le syndicaliste de la CGT Thierry Lepaon, dans un entretien au Monde, ont ainsi estimé que "le Medef gouvernait la France" et que "Pierre Gattaz [son président] était devenu le nouveau Premier ministre".
"Ce pacte avec le 'business' était le seul choix possible, affirme le politologue qui estime par ailleurs que le tournant pris par l'Elysée "est un challenge énorme car il impose des réformes importantes qui peuvent devenir impopulaires".
François Hollande et Jean-Marc Ayrault n'ont aucune raison de s'opposer et assument ensemble les prises de risque dans la "bataille pour l'emploi" qu'ils entendent mener jusqu'à "l'inversion de la courbe du chômage".
Un vieux couple
La hiérarchie est établie au sommet de l’exécutif sans que personne ne trouve à y redire. "Ils sont en phase, en ce moment", confie , prudent, un proche du chef de l’Etat dans Le Parisien. En clair, la présidence de la République mène la barque quand Matignon soutient et participe sans sourciller.
Pacte de responsabilité mardi, décentralisation mercredi, dépense publique jeudi… Autant de discours ou de réunions auxquelles François Hollande associe Jean-Marc Ayrault. Lors de ses vœux aux forces économiques le chef de l’Etat a précisé que le Premier ministre présidera l'observatoire des contreparties, créé pour juger notamment des "créations d’emplois" réalisées en réponse à la baisse des charges.
Le spectre du remaniement existe en permanence mais plus comme une option que comme une menace. "Les deux hommes s'estiment depuis longtemps", assure Gérard Grunberg à propos de celui qui fut patron des députés PS, quand l’actuel chef de l’Etat dirigeait le parti.
En fait les deux hommes sont un vieux couple. Dès 2011, il préparait Jean-Marc Ayrault à occuper de hautes fonctions, lui intimant le conseil de "se ménager". Le futur Premier ministre venait de le soutenir pour la primaire PS.