Notre-Dame: l'ex-directeur de thèse de l'assaillant décrit un homme "pro-occidental" mais "seul"
"Je suis tombé de ma chaise". C'est ainsi qu'Arnaud Mercier, professeur d'information et communication à l'université Paris II-Assas, a raconté ce mardi soir sur BFMTV sa réaction lorsqu'un de ses anciens élèves lui a appris, peu avant 20h, que l'homme qui a agressé des policiers sur le parvis de Notre-Dame de Paris, blessant l'un d'entre eux à la tête, plus tôt dans la journée, avait été son "thésard".
Un CV fourni
C'est lorsqu'il était en poste à Metz qu'Arnaud Mercier s'est retrouvé pour la première fois en contact avec le futur assaillant. "Je l’ai connu en 2013. Son CV, qu’il m’avait envoyé pour s’inscrire en thèse, mentionnait qu’il était diplômé d’une université en Suède en 2008 et 2010 d’un cursus en journalisme, qu’il avait exercé la fonction de journaliste en Suède puis en Algérie et qu’il avait fait son reportage de fin de diplôme sur le processus de réconciliation en Algérie après les terribles années de plomb et qu’il avait fait son mémoire de master sur la couverture par les médias suédois de la guerre au Sri Lanka." L'universitaire a poursuivi:
"Il était trilingue et il faisait même des travaux de traduction du suédois en arabe, m’avait-il dit, pour vivre. Et quand il s’est inscrit en thèse, son sujet portait sur la manière dont les médias du Maghreb couvraient les élections nationales dans les autres pays avec une problématique que je trouvais tout à fait intelligente et fine, qui était la manière dont ses médias essayaient d’utiliser la couverture des élections dans un autre pays pour glisser de façon insidieuse des messages critiques contre les autorités nationales exerçant la censure."
"Il était aux antipodes de ça"
Il n'y avait alors aucun lieu de soupçonner un basculement éventuel vers l'islam radical de celui qui a, ce mardi, assuré avoir agi "pour la Syrie" et en tant que "soldat du Califat": "Celui que j’ai connu il était aux antipodes de ça. (...) Quand je l’ai connu, c’est quelqu’un qui était pro-occidental et pro-démocratie qui croyait beaucoup à la mission des médias, à la réconciliation démocratique etc. Je l’ai vu dix ou douze fois et à chaque fois pendant 1h ou 1h30, on discutait de son sujet.", a détaillé Arnaud Mercier.
Celui-ci s'est cependant remémoré deux détails saillants: "La dernière fois que je l’ai vu, c’était en juin 2016 et il m’avait fait part du fait qu’il se sentait seul. Et ça, ça lui pesait. Pour le reste, le seul signe un peu bizarre dans notre relation c’est que quand je l’ai relancé en novembre pour faire un peu le point et en lui disant : ‘Il faudrait qu’on se revoit en décembre’, - car en gros on se voyait tous les six mois – il ne m’a pas répondu. Il y a sûrement eu un mouvement de rupture cet automne qui fait qu’il n’était plus du tout le même."
Il l'avait suivi de Metz à Paris
Arnaud Mercier a pu expliquer la présence de son ancien étudiant à Paris. Ce dernier l'y avait suivi depuis Metz. "Quand j’ai été muté à l’université de Paris II-Assas en septembre 2015, il m’a dit : ‘Monsieur le professeur’- car il était très obséquieux- ‘puisque vous allez à Paris, moi ça faisait un moment que je me disais que la Lorraine ça ne m’intéresse plus, ça va me donner l’occasion de m’installer à Paris. Comme ça, ce sera plus simple de se voir et pour moi de trouver du travail. Il n’avait pas beaucoup d’argent car il s’est installé dans une résidence étudiante à Cergy-Pontoise."
Arnaud Mercier a alors conclu: "Il courrait le sou mais rien ne laissait prévoir une telle fin."