CRS mis en examen: "Je n'ai jamais reçu autant de violence", témoigne une manifestante
"Je n'ai jamais vu ni reçu autant de violence." Un an et demi après les heurts en marge d'une manifestation de gilets jaunes, l'émotion reste vive chez Manon. Le 1er décembre 2018, la jeune femme de 28 ans assistait, avec son conjoint Max, à un rassemblement dans les rues de Paris quand la situation s'est envenimée.
"On s'apprêtait à rentrer quand un nuage de lacrymogène est arrivé sur nous. C'était irrespirable, on ne voyait plus rien. A un moment on a entendu 'Venez par là' alors on a suivi le mouvement. On s'est retrouvé dans une pièce, Max était en train de vomir, moi je suffoquais", raconte-t-elle à BFMTV.
"Traumatisée"
Le couple a en fait trouvé refuge, avec d'autres gilets jaunes, dans un fast-food Burger King près de la place de l'Etoile. Des CRS interviennent en renfort dans le restaurant, informés de cette intrusion qui aurait été suivie d'actes de vandalisme. Une fois à l'intérieur, une douzaine de CRS frappent, parfois violemment, les gilets jaunes, comme en témoignent des images de vidéo amateur.
Manon, qui assure ne pas faire partie des casseurs, compte parmi les personnes qui ont été violentées. Elle garde encore les séquelles de ce passage à tabac: "Aujourd'hui j'ai toujours mal au bras. Je n'aurais pas cru être toujours autant traumatisée plus d'un an après", témoigne-t-elle, choquée que ces gestes proviennent "de l'uniforme".
"On n'avait rien fait, on était en position de faiblesse", insiste-t-elle.
Parmi la douzaine de CRS présents ce jour-là dans le Burger King, quatre ont été identifiés comme violents et mis en examen, ce mardi, pour violences volontaires exercées par personne dépositaire de l'autorité publique. Deux d'entre eux sont également poursuivis pour violences volontaires avec incapacité de travail de moins de huit jours par personne dépositaire de l'autorité publique en réunion et avec arme.
"Tabassés gratuitement"
"Je suis contente qu'ils aient été mis en examen, ça a été plus vite que ce qu'on pensait. J'ai hâte d'entendre leur version parce que tout les accable: les vidéos, les témoins qui eux aussi se sont fait tabasser gratuitement", commente Manon. Et d'ajouter: "Comment peut-on excuser ce qu'ils ont fait ? On leur demande d'encadrer une manifestation et voilà comment ça se finit"
Dans un rapport de fin d'enquête préliminaire de mai 2019, l'IGPN - qui a mené l'enquête - a reconnu que des violences "qui ne semblaient pas justifiées" avaient été commises lors de cette intervention menée par la première section de la 43e compagnie républicaine de sécurité de Chalon-sur-Saône. L'IGPN citait notamment le cas de Natan A., qui avait reçu 27 coups de matraque, portés par six policiers, avant de pouvoir sortir du restaurant. Les mis en cause encourent jusqu'à 5 ans de prison.