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"Je survis pour mes enfants": leur agresseur présumé remis en liberté, des victimes de viol protestent dans l'Eure

Quatre femmes victimes de viol organisent un rassemblement contre les violences faites aux femmes, ce samedi à Beuzeville (Eure), alors que leur agresseur présumé a été remis en liberté.

Une injustice. Quatre femmes de l'Eure ont décidé de se rassembler ce samedi après-midi à Beuzeville pour protester contre les violences faites aux femmes. Elles veulent également faire entendre leur détresse.

Leur ancien patron, gérant d'une pizzeria, a été condamné à 14 ans de prison par la cour d'assises de l'Eure l'année dernière, pour viol et violences sexuelles. Ce dernier a été relâché et placé sous contrôle judiciaire depuis le 10 janvier, en vue de préparer son procès en appel.

Les victimes sont sous le choc. BFM Normandie a pu rencontrer l'une d'entre elles. Élodie* explique avoir été violée "à plusieurs reprises" par son patron entre juin et novembre 2015.

"C'est moi qui suis en prison"

La décision judiciaire est "dure à accepter", confie la quarantenaire. "Il doit être en prison, là, c'est moi qui suis en prison". Car la mère de famille indique ne plus pouvoir vivre normalement. "Je ne sors pas, je suis obligée de faire les courses avec des personnes, je ne fais pas les magasins, je suis enfermée chez moi", raconte-t-elle.

La femme, âgée de 40 ans, annonce ne plus pouvoir travailler. "Je ne vis pas, je survis, pour mes enfants, pour les gens qui m'entourent et pour les autres victimes aussi".

L'agresseur présumé habite à une quinzaine de minutes de chez elle. Une situation qui lui pèse. D'autant plus qu'elle a découvert qu'elle fréquentait un même lieu que son ancien patron.

"J'ai lu le rapport que j'ai reçu et j'ai vu qu'il faisait ses soins" dans le même centre médical, là où Élodie se fait suivre depuis 2015. "C'est-à-dire qu'on peut se rencontrer dans la salle d'attente", s'étonne cette dernière.

L'avocat de la victime surpris de la remise en liberté

Son avocat, maître Sylvain Naviaux, n'explique pas la décision. "Il y a beaucoup de personnes qui bénéficient de la présomption d'innocence et qui restent détenus jusqu'à la comparution devant la juridiction", assure-t-il.

"Lorsqu'il y a une telle condamnation, on peut être particulièrement surpris de cette remise en liberté, qui ne se fonde aucunement sur une remise en cause de l'arrêt qui a été rendu", complète l'avocat.

Interrogé par BFM Normandie, l'avocat du mis en cause n'a pas souhaité répondre à nos questions.

La cour d'assises de Rouen se réunira au mois de juin pour le procès en appel de l'ancien patron de pizzerias.

Élodie espère que ce rassemblement de samedi pourra avoir un impact. Elle souhaite "dire aux femmes que quand on ne veut pas, c'est non (...) Qu'il faut parler, porter plainte. C'est très dur, mais il faut qu'elles se battent".

3919: le numéro de téléphone pour les femmes victimes de violences

Le "3919", "Violence Femmes Info", est le numéro national de référence pour les femmes victimes de violences (conjugales, sexuelles, psychologiques, mariages forcés, mutilations sexuelles, harcèlement...). C'est gratuit et anonyme. Il propose une écoute, informe et oriente vers des dispositifs d'accompagnement et de prise en charge. Ce numéro est géré par la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF).

*Le prénom a été changé.

Paul Biloquet et Alicia Foricher