Les palestiniens sans illusions avant la reprise du dialogue

Les drapeaux palestinien (en haut) et israélien. La reprise, le 2 septembre à Washington, du dialogue direct avec Israël n'inspire aucun espoir aux Palestiniens, pour qui la perspective d'un Etat indépendant n'est rien d'autre qu'un rêve. /Photos d'archiv - -
par Tom Perry
RAMALLAH, Cisjordanie (Reuters) - La reprise, le 2 septembre à Washington, du dialogue direct avec Israël n'inspire aucun espoir aux Palestiniens, pour qui la perspective d'un Etat indépendant n'est rien d'autre qu'un rêve.
"Il y a eu beaucoup de négociations de paix, mais nous n'avons vu aucun résultat. Nous n'avons plus d'espoir", résume Louaï Kabbah, un Cisjordanien âgé de 30 ans qui était encore sur les bancs de l'école lorsque le processus de paix a débuté, en 1993.
Beaucoup de Palestiniens partagent son pessimisme, qui prévaut également en Israël, après des années de rendez-vous manqués, de dates limites repoussées et de discussions infructueuses, ponctuées de violences.
Les exigences du gouvernement israélien, l'incapacité des Etats-Unis à le faire fléchir et les divisions croissantes de leurs dirigeants depuis la mort de Yasser Arafat, en 2004, sont venues à bout de leurs espoirs.
A cela s'ajoutent les rivalités avec un Hamas devenu maître de la bande de Gaza en juin 2007. L'événement a jeté une nouvelle ombre sur le futur Etat palestinien, dont l'enclave est indissociable aux yeux de l'Autorité palestinienne.
"Pour le moment, le maintien du statu quo est ce qu'on peut espérer de mieux", estime Ahmad Aoueïda, directeur d'une Bourse palestinienne créée dans les années 1990, alors que les espoirs de paix étaient encore vifs.
"ON CONNAÎT LA FIN"
"Le processus de paix? Quel processus de paix? Cela ne vous paraît pas stupide, 18 ans après ?", s'emporte-t-il. "Il n'y a que deux scénarios possibles. La version optimiste, c'est le statu quo. La pessimiste, c'est la détérioration."
"Il y a eu des difficultés par le passé. Il y en aura encore", a sobrement commenté la secrétaire d'Etat Hillary Clinton, qui a invité vendredi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas à Washington, le 1er septembre, à la veille de la reprise du dialogue direct.
Entre autres difficultés, les négociateurs des deux camps dont les discussions se dérouleront sous l'égide du Quartet des médiateurs internationaux, devront venir à bout de leurs divergences en ce qui concerne les frontières du futur Etat palestinien, le sort des colonies juives de Cisjordanie et le statut de Jérusalem, points les plus épineux du conflit.
Le Quartet, qui réunit les Etats-Unis, la Russie, l'Union européenne et les Nations unies, juge quant à lui qu'un règlement définitif peut être scellé en un an.
Affaibli par l'échec des précédentes discussions, Mahmoud Abbas s'est efforcé d'obtenir un ordre du jour clair et faisait de l'arrêt des activités de colonisation la condition de la reprise du dialogue direct.
Ses détracteurs dans le camp palestinien lui reprochent d'avoir échoué sur les deux tableaux. Comme Israël, les Etats-Unis récusent toute condition à la reprise du dialogue.
Abbas, alias Abou Mazen, dit avoir fait l'objet d'une pression internationale sans précédent.
"C'est un échec d'un bout à l'autre. Netanyahu ne lâchera rien, ni dans un an, ni dans plusieurs années. Abou Mazen a été contraint d'accepter, les pourparlers n'aboutiront donc jamais", prédit Djamal Khamis, ouvrier d'une fonderie de Gaza.
"Nous sommes les spectateurs d'un théâtre", estime quant à lui Samir Houlileh, directeur général de Palestine développement et investissement (Padico), une société mise sur pied au début du processus de paix.
"Nous avons vu la pièce tant de fois, sous différentes formes, parfois avec des visages différents, mais c'est toujours la même. On connaît la fin", ajoute-t-il.
Avec Ali Saoufta et Nidal al Moughrabi à Gaza, Jean-Philippe Lefief pour le service français