Les forces franco-maliennes contrôlent les accès à Tombouctou

Un militaire malien sur une route entre Konna et Sévaré. - -
Des soldats français et maliens contrôlaient lundi matin les accès et l'aéroport de Tombouctou (Mali) à l'issue d'une opération terrestre et aérienne menée dans la nuit, a annoncé le porte-parole de l'état-major des armées (EMA) à Paris. Le colonel Thierry Burkhard a précisé que les forces françaises et africaines contrôlaient désormais la « Boucle du Niger » entre les deux bastions islamistes de Tombouctou (900 km au nord-est de Bamako) et Gao (1 200 km au nord-est de la capitale malienne). Selon le porte-parole, la manoeuvre conjointe des forces françaises de l'opération Serval et des forces maliennes s'est déroulée avec un appui de patrouilles d'avions de chasse français. Le groupement tactique interarmes (GTIA) 21, venant de l'axe Diabali, Néré, Goundam a saisi l'aéroport de Tombouctou. Dans le même temps, un largage de parachutistes avait pour objet de bloquer les « exfiltrations ennemies » tandis qu'un groupement aéromobile (hélicoptères) était engagé en appui de ces deux forces.
Les USA de plus en plus impliqués
Paris a reçu dans la nuit une nouvelle marque de soutien de la part des Etats-Unis, qui ont accepté à sa demande de ravitailler en vol les avions français engagés au Mali. Lors d'un entretien téléphonique, le secrétaire américain à la Défense, Leon Panetta, et son homologue français, Jean-Yves Le Drian, ont en outre évoqué la possibilité pour les Etats-Unis de transporter des militaires de pays africains. Vendredi, Barack Obama s'était entretenu par téléphone avec François Hollande et le Pentagone avait confirmé mardi que des avions de transport C-17 de l'armée américaine aidaient au déploiement des unités de l'armée française. Côté africain, les chefs d'état-major de la région ont porté samedi à 7.700 hommes les effectifs promis dans le cadre de la Misma, soit 2 000 de plus que prévu. Liberia, Guinée-Bissau, Burundi, Guinée et Uganda doivent y être associés, mais on ignore si les problèmes de financement, de transport et d'équipement ont été résolus. Pour l'heure, seuls 1 900 soldats africains sont arrivés au Mali. Une longue colonne de véhicules blindés et de plusieurs centaines de militaires tchadiens a quitté Niamey samedi en direction de la frontière malienne.
« La prise de Tombouctou n’est pas significative d’une victoire militaire »
Pour André Bourgeot, chercheur au CNRS, spécialiste du Mali, si l’avancée des troupes dans le nord du pays est un bon signe, il ne faut pas crier victoire trop rapidement. Une guerre éclair n’est pas, selon lui, envisagée. « J’écarte cette hypothèse. Les prises de Gao, Tombouctou et Kidal, ne sont pas significatives d’une victoire militaire du côté des forces françaises, maliennes et de la CEDEAO. Maintenant les djihadistes vont se replier dans les zones désertiques qu’ils connaissent très bien. Ça va changer d’aspect d’autant que les Occidentaux et les militaires maliens ne sont pas habitués à ce genre de guérilla dans laquelle on retrouve des grottes, des canyons, des dunes… »
« Plus facile pour l’ennemi de conduire des attaques fulgurantes »
Même constat pour le général Vincent Desportes, professeur associé à Sciences-Po Paris et ancien directeur de l'Ecole de guerre. Selon lui, ce repli des islamistes dans le nord va compliquer la tâche des militaires franco-maliens. « Dans les villes, l’ennemi pourra conduire contre nous des manœuvres terroristes : nous harceler avec des méthodes terroristes que nous connaissons bien notamment en Afghanistan. Dans le nord du Mali, l’espace devient plus grand et il sera plus facile pour l’ennemi de conduire des manoeuvres avec des attaques fulgurantes et des replis rapides. Il peut donc espérer là compenser infériorité numérique par sa furtivité dans le désert ».