Quai d'Orsay: la masse salariale du personnel diplomatique à l'étranger a crû de 20% en 10 ans

La masse salariale de la mission "Action extérieure de l'État" a crû de 20 % de 2008 à 2018 alors que les effectifs baissaient de 9,4 %, selon un rapport sénatorial. En cause, la forte hausse (24%) de l'indemnité de résidence à l'étranger (IRE) des civils et militaires +expatriés. Le document épingle l'opacité de son calcul.
Les dépenses en salaires des personnels civils et militaires du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (MEAE) en poste à l'étranger ont fortement augmenté sur la dernière décennie, s'alarment deux sénateurs. La masse salariale de la mission "Action extérieure de l’État" a crû de 20 % entre 2008 et 2018 malgré une forte diminution des effectifs de l'ordre de 9,4% soit 1222 postes équivalents temps plein, sur la même période, souligne ce rapport d'information.
Ainsi, en 2018, l'ensemble des rémunérations (salaires, primes, indemnités) pour les personnels civils et militaires en poste à l'étranger, a atteint 954 millions d'euros, contre 796 millions dix ans plus tôt. Or, "la masse salariale des ministères et des opérateurs employeurs d’agents à l’étranger doit pourtant diminuer de 7,9 % d’ici 2022 dans le cadre du programme de transformation "Action publique 2022". Pour le MEAE, cette réforme doit se traduire, à horizon 2022, par une économie de masse salariale de 45,1 millions d’euros, soit un taux d’effort de 5,7 %" s'inquiètent les sénateurs Vincent Delahaye (Union centriste) et Rémi Féraud (Socialiste et Républicain).
L'indemnité de résidence à l'étranger est défiscalisée
"L’essentiel de la hausse de la masse salariale, dans un contexte de diminution des effectifs, s’explique par l’augmentation de l’indemnité de résidence à l’étranger (IRE). L’IRE des personnels civils et militaires a augmenté de 24 % entre 2008 et 2018. Elle représentait 36% de la masse salariale en 2008 et en représente désormais 42%" soulignent les sénateurs Vincent Delahaye (Union centriste) et Rémi Féraud (Socialiste et Républicain).
En outre, "l'IRE n’est pas soumise à l’impôt sur le revenu, alors qu’elle ne fait pas l’objet d’une justification de dépenses réelles. Au total, le coût fiscal de l’IRE a été estimé dans une fourchette de 100 à 150 millions d’euros par an" déplorent le rapport sénatorial qui critique son mode de calcul très opaque.
Un mode de calcul de l'IRE "illisible"
"Le montant de l’IRE servie à chaque agent est très variable dans la mesure où il est déterminé par le croisement de plusieurs critères, notamment le niveau de difficulté de la zone d’affectation, le lieu d’affectation (242 grilles d’implantations diplomatiques), l’emploi occupé, le corps, le grade et l’échelon (18 groupes)" constatent les deux sénateurs pour qui "le mode de fixation des IRE est par conséquent illisible et très mal connu des agents, d’où une perte de légitimité du mécanisme."
Dans leurs recommandations, ils préconisent "de rendre la méthode de calcul de l’IRE plus transparente et mieux expliquer les évolutions individuelles de celle-ci" et "d'engager une réflexion sur la fiscalisation de tout ou partie de l’IRE, applicable de façon progressive". Plus généralement, les sénateurs considèrent qu'il faut "revoir la chaîne de pilotage de la masse salariale et des effectifs pour qu’il n’y ait qu’un seul pilote, à même de décliner la réforme."
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