Pourquoi le droit de retrait va coûter plus cher aux cheminots qu'une grève classique

Considérant qu’il s’agit d’une "absence irrégulière" la direction de la SNCF va appliquer aux cheminots ayant exercé leur droit de retrait une retenue sur salaire plus importante que celle prévue en cas de grève.
Il faut protéger la loi sur le service minimum dans les transports publics, sinon cela va devenir un enfer. Tel est le mot d’ordre à la direction de la SNCF après le vaste mouvement social qui, le week end dernier, a perturbé le départ en vacances de dizaines de milliers de Français. Pas question donc de laisser impuni ce "pseudo" recours au droit de retrait, comme le qualifie Guillaume Pepy.
Le PDG de la SNCF raconte comment il a choisi de gérer ce qui pourrait être perçu comme un piège tendu par la CGT des cheminots. Recours d’abord à une technique très classique: la carotte et le bâton. Carotte, en engageant des discussions immédiates avec les organisations syndicales pour "prendre le pouls des inquiétudes". Bâton, en menaçant de sanctions disciplinaires les cheminots refusant de reprendre le travail.
Des sanctions très pénalisantes puisque, selon la direction de la SNCF, elles bloquent pendant trois ans l’accès à d’éventuelles promotions. "Cela a produit ses effets puisque lundi tout le monde s’est remis au travail", souligne Guillaume Pepy satisfait de ne pas avoir eu besoin d’en passer par la justice pour faire cesser le mouvement. Mais pour autant, le dossier n’est pas clos.
120 euros par jour d'absence
Car si la direction n‘appliquera pas de sanctions disciplinaires aux cheminots impliqués dans ce mouvement de contestation sociale, tous ceux qui ont exercé leur droit de retrait seront sanctionnés par une retenue sur salaire pour "absence irrégulière".
Un motif bien plus pénalisant financièrement que s’ils s’étaient mis en grève. "En moyenne, la pénalité financière pour une grève s’élève à 70 euros par jour. Mais pour une absence irrégulière c’est 120 euros par jour", souligne Guillaume Pepy.
Aux cheminots pénalisés de contester la décision
S’ils contestent cette retenue sur salaire, les cheminots devront se retourner vers le conseil des prud’hommes. Mais la direction de la SNCF se dit certaines de son fait et, compte tenu de la jurisprudence, elle ne redoute pas une décision de justice invalidant ces retenues sur salaire.
La fermeté affichée par Guillaume Pepy vise aussi à rétablir un rapport de force avec des syndicats dont l’objectif est de "maximiser l’impact médiatique en minimisant le coût financier pour les cheminots". D’où l’importance de ces pénalités salariales. Le PDG qui gère ici la dernière crise de son long règne reconnaît néanmoins la maestria de la CGT, chef de file de ce mouvement plus ou moins spontané. Une gestion de la communication que l’on peut mesurer dans le sondage Elabe pour BFMTV.
Un Français sur deux approuve le mouvement
La gêne occasionnée n’a pas empêché 52% des Français de donner raison aux cheminots. Et près de 8 sur 10 estiment nécessaire la présence d’un contrôleur dans les TER. Une présence dont Guillaume Pepy doute qu’elle aurait changé quoi que ce soit.
"Dans les trains modernes, la personne en charge de la sécurité, c’est le conducteur pas le contrôleur", souligne-t-il avant d’expliquer que ce dernier est protégé dans sa cabine par "un espace de survie" où il doit se réfugier en cas de collision.
Situé au pied du siège, cet espace est conçu pour résister à des chocs très puissants. "Le contrôleur, lui ne voit rien, et peut être projeté à terre", relève Guillaume Pepy qui considère sa vulnérabilité, en cas de collision, supérieure à celle des passagers qui sont assis. Pas sûr que cela suffise à convaincre des voyageurs qui, sur ce sujet, partagent le point de vue syndical: l’automatisation à outrance ne peut que nuire à la sécurité.
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