Loi Alimentation: la Confédération paysanne dénonce le "chèque en bois" reçu de la grande distribution
Votée en 2018, la loi Alimentation et le relèvement du seuil de revente à perte (SRP), ont conduit à signer un "chèque en blanc de 1,6 milliard d'euros à la grande distribution", dénoncent ce vendredi, l'UFC-Que Choisir et la Confédération paysanne. Ils s'indignent aussi du "chèque en bois reçu par par les agriculteurs."
Les agriculteurs s'estiment floués par la loi Alimentation promulguée il y a un. "Alors que la hausse de 10% du SRP (seuil de revente à perte) inflige aux consommateurs une inflation qui devrait représenter selon nos calculs 1,6 milliard d'euros sur deux ans, le rééquilibrage des négociations commerciales tant attendu par les agriculteurs et promu par la loi (issue des États généraux de l'alimentation, ndlr) n'a pas eu lieu", estiment l'association UFC-Que Choisir et la Confédération Paysanne. Ceux-ci dénoncent "tout à la fois cet inadmissible chèque en blanc des consommateurs à la grande distribution et le chèque en bois reçu par les agriculteurs."
Selon eux, "pour le lait UHT, alors que depuis 2017 le prix revenant à l'éleveur a diminué de 5%, la marge des distributeurs a au contraire augmenté de 8%". "La grande distribution et l'industrie continuent d'imposer des prix agricoles en dessous des prix de revient à de nombreuses filières", affirment l'association de consommateurs et le syndicat agricole.
"Le prix du lait reste inférieur de 15 à 16% au coût de revient"
"Dans tous les secteurs d'élevage, il n'y a pas de revalorisation de la marge et de la valeur ajoutée qui reviennent aux paysans et qui soient à la hauteur des attentes" a déclaré Olivier Giraud, porte-parole de la Confédération paysanne, sur l'antenne de BFMTV.
"Un an après la promulgation de la loi Alimentation, ce sont des marges supplémentaires données à la grande distribution qui se sont évaporées. Sur le lait, on en est encore à des valeurs inférieures de 15 à 16% par rapport au coût de revient" ajoute le porte-parole du syndicat agricole.
"Le fait de tenir compte des prix de revient agricoles dans les négociations se mettra en place bientôt au mois de novembre. Sur le lait, il y a une augmentation de 3 centimes l'an dernier. Mais ce jour, le bilan n'est pas atteint" a reconnu Serge Papin, ancien patron et Système U et aujourd'hui président de l'atelier 5 des états généraux de l'Alimentation.
L'échec du relèvement du seuil de revente à perte?
Votée l'an dernier, la loi Egalim (ou loi Alimentation) doit permettre de sortir d'un effet domino intenable: la guerre des prix entre les quatre grands de la distribution en France les pousse à réclamer des tarifs toujours plus bas auprès de leurs fournisseurs de l'industrie agroalimentaire, qui eux-mêmes achètent à leur tour le moins cher possible la matière première agricole auprès des paysans, en bout de chaîne.
L'une de ses dispositions phare, le relèvement du SRP, prévoit qu'un produit alimentaire devra être revendu au moins 10% plus cher que le prix auquel il a été acheté.
Sur la base "d'une étude de prix réalisée sur la totalité des magasins des grandes enseignes", en analysant les relevés tarifaires du cabinet Nielsen pondérés par les volumes de ventes du panéliste IRI, les prix alimentaires ont subi lors de l'entrée en vigueur de la mesure (au 1er février 2019, ndlr) une "brutale augmentation" de plus de 0,83% en un mois seulement. Par ailleurs, ajoute le communiqué, au lieu de modérer leurs marges, comme ils l'avaient promis "en contrepartie de la hausse du SRP", les industriels et la grande distribution n'ont pas tenu leur promesse.
Enfin, l'UFC-Que Choisir et la Confédération paysanne dénoncent le non-respect de la prise en compte du prix de revient pour l'agriculteur pour fixer celui à l'achat, qui était l'une des promesses de la loi: "ainsi, le lait de vache est acheté 15% en dessous du prix de production et la viande 14%".
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