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Transition énergétique: les fournisseurs automobiles craignent 500.000 pertes d’emploi en Europe

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L'association européenne des fournisseurs automobiles juge que selon la trajectoire actuelle, 70% des postes seraient même perdus avant 2030.

La transition énergétique va entrainer une réallocation d’ampleur de certains emplois. En particulier, l’automobile devrait être chamboulée par le passage à l’électrique: selon les informations recueillies par la CLEPA, l’association européenne des fournisseurs automobiles, c’est jusqu’à 500.000 postes qui pourraient disparaitre d’ici à 2040.

L’étude publiée ce lundi 6 décembre construit trois scénarios, d’une approche hybride à l’électrification radicale de la flotte, en passant par le scénario actuel, suivant les principes fixés par les propositions législatives "Fit for 55" de la Commission Européenne. Avec pour conséquence, à horizon 2030, une flotte en fabrication composée de 50, 100 ou 70% de véhicules électriques.

Du scénario adopté dépend la violence du choc sur les emplois du secteur: dans le cas d’une transition suivant les directives politiques actuelles, 70% des pertes d’emploi (359 0000) estimées auraient lieu avant 2035, souligne la CLEPA.

Fortes disparités

Les marchés les plus dépendants à la combustion fossile sont ceux d’Europe centrale, quand l’Europe de l’Ouest pourrait mieux s’en tirer sur l’électrique à court terme. Ce, malgré des disparités: la France pourrait voir l’emploi se renforcer (31.000 postes contre 28.000 aujourd’hui) quand l’Allemagne ou l’Italie subiraient de lourdes pertes (-55% et -80% des emplois).

La CLEPA a obtenu ces chiffres en sondant près de 200 fournisseurs européens, et en appuyant les sondages de l’avis d’experts. Leur conclusion traduit également une différence importante entre les constructeurs eux-mêmes et leurs sous-traitants.

"Les constructeurs ont une plus grande capacité à diversifier or internaliser des activités pour compenser une perte d’activité, les fournisseurs automobiles ne peuvent réagir qu’avec moins d’agilité, puisqu’ils sont liés aux fabricants par des contrats à long-terme".

Les constructeurs divisés

Ces chiffres s’ajoutent aux constat faits par le secteur automobile tout entier. La semaine dernière, Carlos Tavares, le PDG de Stellantis, s’insurgeait des coûts engendrés par la transition énergétique, imposée par les pouvoirs publics.

"L’électrification impose 50% de coûts supplémentaires à l’industrie automobile", avait souligné le patron à Reuters, estimant que Stellantis devait atteindre les 10% de productivité supplémentaire par an jusqu’en 2025, contre 2 à 3% en temps normal.

Herbert Driess, dirigeant de Volkswagen, a lui lourdement investi dans l’électrique. Et juge qu’un rapport allemand publié l’année dernière, faisant état de 400.000 possibles pertes d’emplois dans le pays, surestime le problème. "Une bonne partie de la voiture reste la même. Il y a toujours les sièges, la peinture, la carrosserie, les roues et les essieux. Je dirais que pour 70 à 80% du secteur, il n’y a pas de transition".

Biocarburants et souveraineté sur les batteries

La CLEPA milite pour l’emploi de technologies de transition, comme les biocarburants, ainsi que pour l’emploi de différentes technologies incluant l’hydrogène.

Globalement, l’association réfute le calcul des émissions uniquement lié au fonctionnement des moteurs, mais veut prendre les émissions liées à la production, notamment de l'électrique, et des composants comme les batteries.

Dans le scénario d’un recours massif aux moteurs électriques, elle estime en outre que 70% de la valeur ajoutée, soit 70 milliards d’euros, sera liée à une propulsion électrique, sera liée à la fabrication et à l’assemblage de batteries. L’élaboration d’une chaine de valeurs européennes dans le domaine s'avère donc cruciale, et pourrait réallouer 43% des emplois perdus.

Valentin Grille