Pourquoi le Mozambique va devenir le nouvel eldorado africain du gaz

Avec près de 5000 milliards de m3 de gaz conventionnel, le Mozambique détient les 9èmes réserves de gaz au monde. - Roberto Matchissa-AFP
Le géant américain Anadarko va investir 25 milliards de dollars (22 milliards d'euros) dans l'exploitation de gisements offshore de gaz dans le nord du Mozambique, un projet colossal pour un pays pauvre (140ème au classement mondial, par son PIB).
"C'est le plus important investissement direct étranger de l'histoire de notre pays", s'est réjoui le président mozambicain Filipe Nyusi, lors d'une cérémonie à la capitale Maputo en présence du PDG d'Anadarko, Al Walker. Cet investissement intervient presque dix ans après la découverte de réserves gigantesques de gaz au large de la province du Cabo Delgado (dans l'extrême nord du pays).
Il se trouve que cette future exploitation gazière va bientôt tomber dans le giron de Total. Le groupe pétrolier français a conclu un accord avec Occidental Petroleum en vue de racheter pour 8,8 milliards de dollars (7,8 milliards d'euros) les actifs d'Anadarko en Afrique dont le Mozambique est un des joyaux. Cette opération est soumise à la conclusion du rachat d'Anadarko par Occidental Petroleum, à la suite d'une bataille boursière en avril et mai 2019 remportée sur Chevron, un autre géant pétrolier américain.
Le Mozambique a la 9ème réserve mondiale de gaz
Surnommé parfois le "Qatar de l’Afrique", après la découverte de gigantesques gisements gaziers entre 2010 et 2013, le Mozambique a tardé dans la valorisation de ses ressources gazières. Estimées à 5000 milliards de mètres cubes, soit les neuvièmes réserves du monde en gaz, ces ressources seront valorisées sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL) qui sera destiné principalement à l’export par voie maritime via des navires méthaniers.

Dans le cadre du méga projet dévoilé par Anadarko, une usine de liquéfaction, qui produira 12 millions de tonnes par an en 2024, va voir le jour à Palma (nord du pays) où seront construites toutes les infrastructures liées au marché du GNL (terminaux, trains de GNL, réservoirs, embarcadères etc.). Celles-ci seront reliées par gazoducs aux gisements sous-marins offshore situés à plusieurs dizaines de kilomètres de là.
Les revenus du gaz atteindront 3 milliards de dollars en 2030
De par leur ampleur, ces investissements vont profondément transformer le Mozambique, surendetté, englué dans la crise économique, qui plus est victime d'attentats islamistes près de la future zone d'exploitation gazière.
Selon les estimations du cabinet de consultants Woodmac, "à partir du début des années 2030, les revenus du Mozambique tirés du gaz naturel liquéfié atteindront 3 milliards de dollars par an, doublant à eux seuls les revenus actuels" de cet État africain. Autrement dit, l'ancienne colonie portugaise "accéderait alors rapidement au rang de pays à revenu intermédiaire alors qu’il compte aujourd’hui parmi les plus pauvres au monde" souligne une note de la Direction du Trésor (décembre 2017) sur le gaz au Mozambique.
Le menace islamiste rôde près de la zone gazière
Selon la presse locale, les futurs producteurs de gaz ont largement recours aux entreprises de sécurité privées pour assurer la protection de leurs activités en raison de la menace islamiste. En février et mai de cette année, les jihadistes s'en sont pris à des convois d'entreprises travaillant pour Anadarko. Car, outre celles accordées à l'entreprise américaine Anadarko, des concessions gazières ont également été attribuées dans la région à l'italien ENI, au chinois CNPC, à l'américain Exxon Mobil et au portugais Galp.
"Pour les investisseurs étrangers, l’absence d’infrastructures de base et de main d’œuvre qualifiée constitue un autre obstacle de taille qu’il conviendra de surmonter et qui pourrait faire gonfler le coût global de leurs investissements" explique la note du Trésor, qui estime, cependant, "que le Mozambique deviendra probablement d’ici quelques années un acteur important du marché mondial du GNL".