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Surgelées ou fraîches, depuis le scandale Buitoni, les Français boudent les pizzas en supermarchés

Les consommateurs n'ont plus confiance. Les ventes de pizzas surgelées ou fraîches en supermarché se sont effondrées depuis le scandale Buitoni.

L'affaire Buitoni a écorné la confiance des consommateurs. Depuis le début des années 2000, aucun autre scandale sanitaire n'avait eu de telles répercussions. Les lots de pizzas Buitoni contaminés à la bactérie E.coli ont beau avoir été retirés des supermarchés depuis mars, les Français boudent le rayon.

Le chiffre d'affaires généré par les ventes de pizzas surgelées en grande distribution s'est effondré de 34,2% entre le 14 mars et le 19 juin par rapport à l'année précédente, selon les données transmises par Nielsen à BFM Business. Les ventes de pizzas fraîches, dont aucun lot n'avait pourtant été contaminé, souffrent également, avec une baisse de 9,4% à cette même période. Elles étaient en progression en début d'année.

Deux enfants décédés

Depuis le mois de février, Santé publique France a recensé 56 cas d'intoxication à la bactérie E. coli, liés à la consommation de pizzas surgelées Buitoni. Parmi eux, 55 enfants, dont deux sont décédés. D'autres gardent de graves séquelles.

Les parents d'une petite fille de 12 ans, victime d'un syndrome hémolytique et urémique provoqué par une pizza Buitoni contaminée, ont témoigné lundi sur RMC. Lena a des "déficiences mentales, beaucoup de pertes de mémoire. Elle ne reconnaît pas tout le monde. Elle a perdu l’équivalent de quatre ans de sa vie", a expliqué son père.

Fin mars, une inspection de la préfecture et de la DGCCRF dans l'usine de Caudry (Nord), où étaient produites les pizzas Buitoni, a révélé de graves manquements aux règles d'hygiène. Présence de rongeurs, nourriture à même le sol, salariés qui ne se lavent pas les mains... Une information judiciaire a été ouverte le 22 mars pour "homicides involontaires", "tromperie" et "mise en danger d'autrui".

Les images diffusées dans les médias ont choqué. Mais cela ne suffit pas à expliquer l'effondrement des ventes en supermarché.

Une crise "profonde" et "durable"

"A mes yeux, nous sommes sur une crise profonde et durable", estime Olivier Dauvers, spécialiste de la grande distribution.

"Ce n'est pas une simple tromperie, il y a eu des conséquences sur des personnes. La nature du produit dont nous parlons est un autre élément, car certains portent un imaginaire plus problématique que d’autres. La pizza, c’est un produit quotidien et surtout familial. C’est ce que mangent les enfants. La superposition de ces deux niveaux fait que cette crise est grave", ajoute-t-il.

C'est aussi ce qui explique que, contrairement à Kinder par exemple, le scandale affecte tout le rayon pizza et pas seulement la marque Buitoni.

Les consommateurs arriveront-ils un jour à oublier cette affaire?

"A court terme, je suis très dubitatif sur le potentiel de la marque à revenir dans les rayons. A long terme, je ne sais pas, on fait des miracles en marketing. Mais il faut se dire que les distributeurs ont eux aussi été victimes, quelque part. Ils ont dû tout jeter. Si les commerciaux de Buitoni reviennent demain devant les acteurs de la grande distribution, ils ne seront pas accueillis avec des fleurs", prédit Olivier Dauvers.

Le seul exemple comparable serait selon lui le scandale des rillettes Tradilège, vendues par Leclerc dans les années 90. Contaminées par la Listeria, elles furent responsables de la mort de trois personnes et ont conduit à quatre avortements. "Leclerc avait fait disparaître la marque pendant 10 ans, car les rillettes Tradilège étaient devenues les rillettes qui tuent", raconte Olivier Dauvers.

Concernant Buitoni, des plaintes de consommateurs et de victimes ont été déposées un peu partout en France. Le pôle santé du parquet de Paris est chargé de l'enquête. Aujourd’hui, plus de 70 familles attendent d’être entendues par la justice. Le PDG de Nestlé France, propriétaire de la marque Buitoni, a annoncé mi-juillet la création d'un fonds de soutien aux victimes.

https://twitter.com/Pauline_Dum Pauline Dumonteil Journaliste BFM Tech