175 euros, pass prioritaire, parade payante: la nouvelle politique de prix de Disneyland agace les fans

Picsou a-t-il pris la direction de Disney à la place du PDG Bob Iger? Depuis quelques mois, les tarifs pratiqués par le géant américain semblent être montés à bord de l'attraction Space Mountain.
C'est d'abord le service de streaming qui n'en finit pas de coûter plus cher à ses abonnés. Après une hausse de 5 euros en 2023, l'abonnement premium à la plateforme augmente à nouveau ce mois-ci de 2 euros et passe à 13,99 euros contre 6,99 euros lors de son lancement en France en 2020.
Mais c'est surtout dans les parcs que certains prix font grincer des dents. La gronde a débuté en 2023 quand Disneyland a simplifié son offre de pass annuels en passant leur nombre de trois à quatre avec, au passage, des hausses très importantes. Ces billets illimités à l'année étaient auparavant vendus entre 229 et 499 euros selon les formules, les trois nouveaux tarifs bronze, silver et gold sont désormais compris entre 289 et 699 euros.
Le mécontentement des fans s'est poursuivi cette année à l'approche de la saison hivernale quand Mickey a annoncé que désormais il faudrait payer pour être bien placé durant la fameuse parade des chars et des personnages costumés. Disneyland a créé une "zone réservée" et payante autour de deux scènes en face du château. Moyennant 21 euros la journée et 24 euros le soir par personne, les visiteurs pourront être bien placés quand auparavant il fallait se positionner plus d'une heure avant pour être assuré de bien voir, mais c'était gratuit.
Des coupe-files hors de prix
Vendre toujours plus de services. C'est la stratégie des parcs d'attraction depuis des années et Disneyland est un précurseur. Fini le temps où on ne comptait que sur la boutique pour faire grimper le panier moyen des visiteurs. Les passes coupe-files en font bien évidemment partie. Pour les visiteurs les plus impatients, le parc commercialise depuis des années des coupons permettant d'éviter de faire parfois plusieurs heures de queue pour une attraction.
Des passes de plus en plus variés mais aussi de plus en plus cher. Aux Etats-Unis, le groupe a annoncé que son nouveau Lightning Lane Premier Pass qui permet de passer en premier sur une attraction sans heure d'arrivée spécifique seront vendus selon les parcs et les périodes de l'année entre 129 et... 449 dollars. Par personne évidemment. Le parc français a lui aussi ses coupe-files, moins coûteux mais aussi moins avantageux.
Ainsi le Premier Access One ne coûte qu'entre 5 à 18 euros mais ne permet de gruger la file d'attente qu'une fois par jour et à un horaire précis. Pour les plus fortunés, le Premier Access Ultimate donne un accès prioritaire à 15 attractions par jour parmi une sélection, mais il coûte selon la fréquentation du parc entre 90 et 160 euros en haute saison. Tous ces tarifs se rajoutent bien entendu au prix du billet d'entrée.
Concernant ce billet justement. Disneyland Paris vient d'annoncer une petite révolution: la mise en place d'une tarification dynamique. Si les prix variaient jusqu'à présent en fonction de la saisonnalité et du moment de la semaine, ils restaient fixes une fois pour toute sur l'année. Ce ne sera plus le cas. C'est dorénavant la fréquentation réelle du parc qui fixera le tarif que vous devrez payer.
Comme pour l’avion, plus vous vous y prendrez tôt moins vous paierez cher. D’ailleurs Disney ouvre maintenant ses réservations 18 mois à l’avance contre 12 mois jusqu'à présent. Une fois dans votre panier virtuel, le tarif n'évoluera plus durant une heure.
La tarification dynamique pour démocratiser?
Est-ce ça coûtera plus cher au final? C’est difficile à dire, ça dépendra de la demande. Ce qu’on peut dire c’est que l’amplitude tarifaire sera plus grande: les billets les moins chers débuteront à 50 euros pour un adulte (contre 56 avant) mais ils grimperont à 175 euros pour les deux parcs alors qu’avant les billets les plus chers ne dépassaient pas 130 euros.
Apparu initialement dans le transport aérien, le "surge pricing" a gagné ces dernières années de nouveaux secteurs d'activité comme le ferroviaire, l'hotellerie, les stations de ski mais aussi les concerts dans certains pays comme l'ont constaté récemment les fans en colère du groupe Oasis.
"En France Disneyland est précurseur dans les parcs d'attraction, explique Philippe Berland du cabinet Sia-Partners. Ça va leur permettre d'adresser plus efficacement la demande. Quand on a un seul tarif, certains vont trouver ça trop cher et ne paieront pas alors que d'autres auraient été en mesurer de payer davantage."
La tarification dynamique permet en pratique d'optimiser le remplissage d'un moyen de transport, de lisser une fréquentation sur l'année d'un lieu et donc au final de faire baisser les coûts par usager et donc potentiellement de faire baisser le prix moyen.
C'est qu'assurent la plupart des entreprises qui pratiquent cette tarification dynamique comme la SNCF ou certaines stations de ski.
"La tarification flexible autorise une amplitude de prix beaucoup plus large, avec un tarif minimal plus bas que ne le permettrait une tarification classique, rendant ainsi le ski accessible au plus grand nombre, explique Christian Vigezzi, le directeur du domaine skiable de Saint-Foy-Tarentaise qui vient de la mettre en place avec des tarifs de 28 à 40 euros le forfait.
C'est aussi l'argument de Disney qui rappelle que le prix d'entrée a baissé et que pour des clients s'y prenant à l'avance, le coût est moindre.
"Les gens finissent par s'habituer"
Reste à savoir si les clients seront convaincus. Car cette flexibilité du tarif selon la demande passe souvent très mal auprès des consommateurs. Et pas seulement en France. Suite à la "polémique Oasis", le gouvernement britannique a ainsi promis de se pencher sur ces méthodes controversées de vente de places de concert.
Si les consommateurs admettent que les prix peuvent être différents selon les périodes, ils ont tendance à trouver injuste de payer plus cher pour un même service. Car désormais dans le parc Disneyland Paris, se cotoieront sur une même journée les visiteurs qui s'y sont pris très tôt en payant 50 euros et d'autres qui auront réservé plus tardivement et qui auront déboursé le double.
"Ça crée souvent des réactions négatives chez les consommateurs, reconnaît Philippe Berland. Mais dans certaines industries comme l'aérien, les gens se sont habitués et savent qu'il faut réserver tôt. C'est quand on change de mode de tarification qu'il y a des frictions et un temps d'adaptation."
Pour Disneyland Paris en revanche, l'intérêt est évident. Si la fréquentation du parc est remontée après les années Covid, elle reste encore en retrait de ces records historiques. Selon le rapport annuel du TEA (Themed Entertainment Association), le parc de Marne-la-Vallée reste de loin le plus fréquenté d'Europe avec 10,4 millions de visiteurs en 2023 (contre 9,9 millions en 2022). Mais en 2009, année record pour Disneyland Paris, il étaient plus de 12,7 millions.
Ce n'est probablement pas en 2024 que le parc francilien retrouvera ce niveau. Disney a confirmé qu'il avait subi un effet "JO" négatif sur sa fréquentation estivale. Dans la publication de ces derniers résultats trimestriels, le groupe a concédé un recul de 5% de chiffre d'affaires sur ces activités "Experience" à l'international qui comprennent aussi des croisières.
Mieux cibler la demande avec une tarification dynamique et faire monter le panier moyen en facturant de nouveaux services. Malgré la grogne des fans, Disney compte là dessus pour redresser la barre.
