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"On a servi des Niçois pendant 55 ans": le kiosque "Chez Félix" ferme définitivement ses portes

Cet établissement est géré par la famille de Jean-Charles, le gérant actuel, depuis 1966. Son départ a été précipité par un appel à la concurrence de la ville de Nice en mars dernier.

"C'est très dur pour moi". Ce mardi est tristement spécial pour Jean-Charles, le gérant du kiosque "Chez Félix", dans le quartier de Magnan, à Nice. C'est la dernière fois qu'il pourra vendre ses pans bagnats et pissaladières dans cette institution emblématique niçoise.

Et au micro de BFM Nice Côte d'Azur, Jean-Charles regrette de devoir abandonner cet établissement, géré par son grand-père, puis son père, depuis 1966.

"Je n'ai pas de mots pour exprimer ce phénomène. Je voudrais d'abord rendre un hommage à mes parents, Félix et Mathilde, qui ont permis à ce petit kiosque de devenir une institution. Je pense qu'ils sont déçus que je quitte cet établissement emblématique. C'est très dur pour moi", déclare le fils de Félix, très peiné.

"La fin de ma carrière je la voyais ici, pour moi il y a un goût d'inachevé. J'ai grandi dans ce kiosque et je voulais finir dans ce kiosque", poursuit-il très ému.

"Maintenant c'est argent, pas de sentiments"

Son départ a été précipité par un appel à la concurrence de la ville de Nice en mars dernier. Cet appel est soumis tous les quatre ans depuis 2010. Mais cette année, la proposition de Jean-Charles n'a pas été retenue.

"Qu'est-ce que vous voulez faire, c'est comme ça. Les valeurs maintenant n'ont plus de sens. C'est argent, pas de sentiments", dénonce-t-il.

"On a servi des Niçois pendant 55 ans, on ne casse pas une institution comme ça sur la valeur de l'argent", argue-t-il.

Pourtant, ses plus fidèles clients, qui ont grandi avec ce kiosque jaune et bleu, s'étaient battus pour empêcher sa fermeture. Ils avaient lancé une pétition à la fin du mois de mai à destination du maire de Nice Christian Estrosi. Elle a à ce jour recueilli plus de 7000 signatures.

Des propositions de la mairie refusées

Cette mobilisation a conduit la mairie de Nice à proposer d'autres solutions à Jean-Charles, notamment de s'installer dans un autre kiosque situé près de la piscine Jean-Médecin.

Mais celui-ci a refusé car cet emplacement est difficile d'accès et n'est pas visible depuis la rue. Il précise également qu'il n'y a "aucune garantie" de garder le kiosque "au bout de cinq ans", d'autant que des travaux doivent y être réalisés.

La deuxième solution proposée était de s'installer dans un commerce du Vieux Nice, offre qu'il a aussi déclinée. Pour cause, il se situe à côté d'une institution niçoise contre laquelle Jean-Charles refuse "d'empiéter".

L'émotion "des jeunes et des moins jeunes"

Dans le quartier, les clients aussi font part de leur tristesse et dénoncent une forme d'injustice. "J'ai bien connu papa Félix. Il avait acheté ce kiosque en 1966, c'est ce qui aurait dû faire la différence" explique Paula.

"C'est vraiment dommage que ça s'arrête maintenant. Papa Félix aurait été vivant il aurait été vraiment déçu que les lois passent au dessus des valeurs. Nous sommes bien tristes que ce soit la fin de ce kiosque", poursuit cette Niçoise.

Car au-delà du service et du bagnat servi par Félix, le kiosque était un point de rencontre. "C'est pas que pour le sandwich, c'est un symbole, c'est un lieu de rencontre, là où on voit de plein de gens. C'est dommage parce que c'est très convivial, il y a toutes les générations", raconte Caroline. Cette infirmière rapporte aussi la tristesse de certains de ses patients très âgés.

"Pour eux, c'est pas possible que ce lieu disparaisse. C'est assez nostalgique parce que c'est des souvenirs. L'émotion pour les jeunes et les moins jeunes, elle est la même", ajoute-t-elle.

Ce mardi, c'est avec beaucoup de tristesse que "Chez Félix" repliera son rideau bleu pour la dernière fois, "un grand déchirement" pour Jean-Charles et tout ses clients.

Célia Vallet avec Shéhérazade Ben Essaid