Affaire Guy Georges au cinéma: les témoins de l'époque se souviennent

Ils ont chroniqué le procès, mené l'enquête, instruit le dossier... A l'occasion de la sortie du film "L'affaire SK1" sur la traque de Guy Georges, BFMTV a rencontré les acteurs de l'époque, marqués à vie.
Il s'appelle Guy George, et son nom restera à jamais associé aux sept crimes atroces qu'il a commis entre 1991 et 1997, dans l'Est parisien. Sept jeunes femmes, violées et tuées. L'homme a été traqué des années durant par des policiers acharnés, dépassés par le manque de moyens. Seize ans après son arrestation à la sortie d'une bouche de métro du nord de la capitale, Guy Georges est porté à l'écran dans le film "L'affaire SK1", qui sort ce mercredi en salles.
"Son regard m'a énormément marqué"
Pour les "acteurs" de l'époque, rencontrés par les équipes de BFMTV, les souvenirs, douloureux, restent intacts. Ex-chef de groupe à la brigade criminelle, Michel Bustamante n'oubliera jamais le visage de la première victime, Pascale Escarfail, jeune étudiante blonde de 19 ans. "Son regard m'a marqué énormément. Il voulait dire 'Aidez-moi à trouver celui qui m'a esquinté comme ça'", raconte l'ancien commandant de police.
En 1998, alors placé en garde à vue, Guy Georges racontera ce crime aux enquêteurs. Des aveux qu'il estimera "extorqués" lors de son procès, mais qui seront retranscrits par le président de la cour. "Un soir, j'ai pris un verre. J'ai vu passer une jeune fille blonde. Elle m'a tout de suite plu et j'ai flashé. Je l'ai suivie. Devant un immeuble, elle a composé un code et, comme la porte était longue à se refermer, je me suis glissé derrière elle", lit-on dans le compte-rendu de l'époque de Patricia Tourancheau, journaliste judiciaire à Libération. Les aveux se poursuivent. "Elle a dit: "Qu'est-ce que tu fais? Tu me tues?". J'ai porté encore deux ou trois coups, j'agissais à l'instinct. Elle a mis trois ou quatre minutes à mourir."
"J'avais l'impression d'être au Moyen-Âge"
Avant d'en arriver à ce procès, sept longues années se sont écoulées, durant lesquelles les enquêteurs du "36" se sont épuisés à trouver cet homme. "La police avait extrêmement peu de moyens scientifiques à l'époque. J'avais l'impression d'être au Moyen-Âge...", soupire Jean-Pierre Escarfail, le père de la première victime du tueur. Le fichier d'empreintes génétiques n'existait pas encore, empêchant toute comparaison d'empreinte ADN.
Il faudra attendre la pugnacité du juge Gilbert Thiel pour qu'un recoupement soit fait. En novembre 1997, le magistrat exige alors que "tous les laboratoires qui faisaient de la génétique moléculaire pour le compte de la justice fassent des recherches manuellement dans leurs archives, pour retrouver l'ADN inconnu" de la dernière scène de crime, raconte-t-il. Victoire. Ce travail de fourmi permettra de relier l'ADN mystérieux à celui de Guy Georges, déjà bien connu des services de police. L'étau se resserre autour du tueur.
"J'aurais envie de l'appeler 'La haie de l'horreur'"
Interpellé quelques mois plus tard, l'homme arrive menotté au 36 quai des Orfèvres. Il remonte l'escalier principal. Toute la Crim' est massée sur le côté des marches, fascinée de voir enfin le visage de celui qu'ils ont tant traqué. Une sorte de "haie d'honneur", que l'on voit dans la bande-annonce du film "L'affaire SK1", et qui choque encore aujourd'hui Martine Monteil, alors patronne de la police judiciaire. "J'aurais envie de l'appeler "la haie de l'horreur", parce qu'à chaque marche défilait une fille, une de ses victimes. Et elles, elles sont restées dans nos coeurs."
Condamné à perpétuité, avec 22 ans de réclusion criminelle de sûreté, et actuellement enfermé à la centrale pénitentaire d'Ensisheim, dans le Haut-Rhin, Guy Georges sera libérable à partir de 2020. Patricia Tourancheau, qui a écrit un livre de référence sur l'affaire (*), en sait un peu plus sur l'homme qu'il est aujourd'hui. "Depuis de très longues années, il aurait une amie. Je crois qu'il ne se soigne pas. Et c'est un détenu plutôt modèle." Pourra-t-il sortir en 2020? Seul un comité d'experts pourra statuer. Mais la journaliste de rappeler qu'en garde à vue, lors des aveux, Guy Georges avait lâché une phrase glaçante: "Si je sors, je recommence".
(*) Guy Georges - La traque, Ed. Fayard, 350 pages
Sujet vidéo: Pauline Revenaz, Fabrice Babin, Thibault Dupont, Guillaume Hoair, Julie Paper

Alexandra GONZALEZ
Journaliste
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