La corrida vit peut-être ses dernières heures

La corrida, c’est une tradition pour l’instant, une torture animale pour d’autres. Ce vendredi, le Conseil constitutionnel doit statuer sur la dérogation qui l’autorise dans certaines villes, où partisans et détracteurs s’écharpent. « C’est l’économie de tout un pays », se justifie le maire d’Arles.
La tauromachie est-elle une tradition ancestrale positive pour l’économie, ou une barbarie responsable de la souffrance animale ? Le débat entre partisans et opposants à la corrida fait rage depuis des années, mais le Conseil constitutionnel doit trancher ce matin.
L'article 521-1 du Code pénal réprime en effet les actes de cruauté commis contre les animaux. Mais les défenseurs des bêtes réclament la suppression de l'alinéa 7 de cet article qui prévoit des dérogations à cette règle, autorisant la tauromachie comme les combats de coq sous couvert « du principe de tradition locale ininterrompue ». Ils veulent démontrer « le principe d'égalité devant la loi et l'objectif de clarté que doit revêtir cette loi ». "En cas de rupture d'égalité et manque de clarté, la loi devrait, selon eux, être déclarée anticonstitutionnelle ». C’est ce que le conseil doit confirmer ou infirmier ce jour.
« Soit la loi est la même pour tous les Français, soit elle est différente »
Présidente de l’Alliance Anticorrida, Claire Starozinski est celle par qui tout est arrivé : c’est elle qui a saisi la justice pour vérifier la constitutionnalité de la pratique. « Il y a à peu près 75 villes qui peuvent organiser des corridas en France, résume-t-elle, et il y a une tolérance qui s’applique à certains Français, et pas à tous. Soit la loi est la même pour tous les Français, soit elle est différente pour une partie d’entre eux. Ça, ce n’est pas normal, ce n’est pas constitutionnel », raconte-t-elle pour justifier sa demande.
« L’économie de tout un pays »
De leur côté les défenseurs de la corrida argumentent en expliquant qu'elle revêt un intérêt général.
Hervé Schiavetti, le maire d’Arles, y voit surtout des emplois. « C’est l’économie de tout un pays ! A la fois le maintien d’un biotope extrêmement sensible, avec des élevages extensifs, et en même temps l’économie de la culture et du spectacle implantée dans nos villes depuis 30 ou 40 ans, qui sont pourvoyeurs d’emploi, qui permettent de faire vivre tout un tissu économique du centre-ville particulièrement important. On a besoin de pouvoir l’animer en permanence », demande le maire.
« Mon fils tue un taureau de temps en temps, pour le plaisir »
Et puis il y a la tradition. La passion, le plaisir de ceux pour qui la tauromachie fait partie du quotidien. C’est le cas de Pierrot, patron du célèbre Tambourin, un restaurant d’Arles. « J’ai 60 ans, je vais au taureau depuis toujours. Mon fils a été matador pendant 25 ans, c’est comme ça. Il a arrêté, mais de temps en temps, il tue un taureau pour se faire plaisir, raconte-t-il, avant d’insister : Arles sans taureau, ça n’existe pas, ce n’est pas possible, c’est comme si on nous coupait la tête. On a toujours été là-dedans ». Quant à ceux qui sont contre, ils ont bien le droit, estime Pierrot, mais libre à eux de ne pas y aller. « J’ai des amis qui sont anti-corrida, ils ne vont pas aux arènes. J’ai un petit fils de 5 ans, je l’emmène parfois aux arènes, ça ne veut pas dire que je le torture. Si ça ne lui plait pas, il n’y va pas ».
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