Français candidats au jihad: l’interdiction de sortie du territoire votée

L’Assemblée nationale a voté mardi soir l’une des mesures clés du projet de loi sur la lutte contre le terrorisme, l'interdiction administrative de sortie du territoire visant à empêcher le départ de candidats au jihad en Syrie et en Irak.
C’est un défi majeur dans la lutte contre le terrorisme. Comment empêcher les Français tentés par le jihad en Irak ou en Syrie de mettre leur projet à exécution? A défaut de les en dissuader, une mesure consiste à les empêcher de se rendre dans ces pays. L'interdiction administrative de sortie du territoire pour les candidats au jihad a été approuvée par les députés qui examinent ces jours-ci, le projet de loi de lutte contre le terrorisme.
Cette interdiction de sortie d'un ressortissant français pourra être prise "dès lors qu'il existe des raisons sérieuses de croire qu'il projette des déplacements à l'étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes (...) ou sur un théâtre d'opérations de groupements terroristes". Elle pourra être d'une durée de six mois, renouvelable jusqu'à deux ans, et conduira au retrait immédiat du passeport et de la carte d'identité de la personne concernée.
Six mois renouvelables
D'une durée de six mois, renouvelable jusqu'à deux ans, cette interdiction conduira au retrait immédiat du passeport et de la carte d'identité de la personne concernée qui recevra un récépissé valant justification de son identité.
"Six mois c'est un délai raisonnable car c'est une mesure grave", a jugé le rapporteur du texte Sébastien Pietrasanta (PS) en réponse à des amendements de Pierre Lellouche (UMP) voulant porter cette durée à un an.
La personne ciblée pourra être entendue, assistée par un avocat, par le ministre ou son représentant dans les 15 jours. Elle pourra aussi saisir en référé le juge administratif devant lequel l'administration "ne pourra se prévaloir d'éléments classifiés", a assuré le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve aux écologistes inquiets d'un manque de contrôle judiciaire.
Arrêter à leur retour ceux qui ont réussi à passer
Les personnes faisant l'objet de cette interdiction seront signalées dans le Système d'information Schengen utilisé par les pays de l'espace européen sans frontière. Les compagnies de transport auront interdiction de prendre ces personnes dès lors qu'elles auront été alertées par les autorités de leur présence dans leur système de réservation.
La violation de cette interdiction, punie de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende, constituera un motif pour arrêter à leur retour ceux qui auront réussi à se rendre en Syrie.
930 Français dans les filières jihadistes selon Cazeneuve
Selon Bernard Cazeneuve, environ 930 Français sont impliqués dans des filières vers la Syrie et l'Irak (350 sur place, 180 repartis de Syrie, 170 en transit vers la zone et 230 ayant des velléités de départ), nombre en "augmentation de 74% en huit mois". 36 sont morts sur place.
Pour Sébastien Pietrasanta (PS), cette mesure peut aussi servir à "protéger contre eux-mêmes" des jeunes, notamment des filles, encore peu radicalisés et qui risquent de le devenir en se rendant dans les zones de lutte armée. Depuis le printemps, il existe une plate-forme de signalements grâce à laquelle "au moins 70 départs" ont pu être évités selon le ministre.
Le projet de loi, qui cible également l'apologie du terrorisme sur internet, devrait être voté en procédure d'urgence (une seule lecture) à l'issue des débats mercredi.
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