François Hollande à Echirolles

Retour dans les coulisses de la visite surprise lundi soir de François Hollande et Manuel Valls aux familles de Kevin et Sofiane, les deux jeunes tués vendredi soir à Echirolles.
Trois jours après le drame et la veille de la marche blanche organisée par les familles du quartier, le timing du déplacement a été rapide. Un calendrier plus logique et plus judicieux que lorsque François Hollande s’était rendu cet été dans le Var, deux mois après la mort de deux femmes gendarmes. Le père d’une des victimes avait jugé « déplacée » cette visite tardive.
Cette fois-ci, les parents des victimes ont été sensibles à la visite du président. Aurélie Noubissi, notamment, la mère de Kevin, a longuement reçu François Hollande dans son appartement d’Echirolles. Elle lui a dit qu’elle n’avait pas du tout dans le cœur de désir de vengeance, ni de haine. Bien sûr, elle demande justice et l’arrestation des assassins mais elle a expliqué que ce qui dominait ce n’était pas « la haine mais la douleur ».
Concrètement, à quoi sert la visite de François Hollande ?
Voilà ce qu’en substance la mère de Kevin a dit au président : « Je me sens soutenue par la France entière ». Et ça, ce sentiment d’une mère, à mon avis, ça justifie pleinement le déplacement du président.
Et puis il y a l’autre dimension, la dimension politique. Le président ne parle pas seulement aux parents. Il parle aux habitants du quartier, à la France entière.
On l’a vu avec les réactions de certains habitants du quartier. Ils attendent plus du président. Une habitante du quartier a lancé au président : « Il faut que ça change Echirolles, c’est devenu le Texas. On est où là ? Tous ces gens-là ont voté pour vous! ».
« Ils ont le droit à la sécurité et c’est ce que je suis venu leur apporter », a répondu le président.
Un échange qui marquera à n’en pas douter le quinquennat de François Hollande.
Un président qui on l’entend est très ému par la colère, l’appel au secours des habitants.
Deux enseignements : sortir de l’Elysée, c’est plus que jamais nécessaire. Etre à l’écoute des Français, trop souvent nos présidents en perdent l’habitude. Et c’est certain que cette interpellation, cet appel au secours va faire réfléchir le président, plus que n’importe quelle note d’un de ses conseillers.
Elle a eu raison, cette habitante, d’interpeller le président. Elle a eu plus de poids hier soir que n’importe lequel des ministres de François Hollande.
Mais attention, deuxième conclusion : maintenant il faut trouver des solutions, agir. Les Français jugeront le président aux résultats. Et qu’attendent-ils ? De la sécurité, de la justice mais aussi une politique pour la jeunesse de ce pays qui doute de l’avenir. La jeunesse c’était la priorité du candidat Hollande. Où sont les nouvelles perspectives pour la jeunesse des quartiers ?
Un président en banlieue… interpellé par les habitants, ce n’est pas nouveau
Bien sûr, et comment ne pas faire le parallèle avec la visite de Nicolas Sarkozy à la Courneuve en 2005. Le ministre de l’Intérieur avait fait une promesse aux habitants du quartier : « Vous en avez assez hein ? Vous en avez assez de cette bande de racailles. On va vous en débarrasser. On va faire en sorte que ces quartiers puissent vivre sans avoir la vie empoisonnée par les voyous ».
Alors on ne va pas relancer la polémique ce matin. Nicolas Sarkozy, François Hollande, c’est deux styles différents, ce n’est pas le même discours. Libre à chacun d’entre nous de préférer l’un ou l’autre. Mais au bout du compte, les Français, tous les Français, réclament des résultats. Et si, sur le plan économique, on nous explique que la France n’a plus beaucoup d’autonomie, que tout se décide à Bruxelles ou dans les multinationales, en revanche sur le plan intérieur, dans le domaine de la sécurité, du vivre ensemble et du projet de société, les politiques ne peuvent pas nous dire qu’ils ne peuvent rien. Refonder les valeurs de notre société, ça devrait être le chantier prioritaire de cette présidence.
Pour écouter les Coulisses de la Politique de Christophe Jakubyszyn du mardi 2 octobre, cliquez ici.
Votre opinion